Saint Joseph d'Arimathie

 

  

 

Nous poursuivons avec saint Joseph d'Arimathie, fêté le 17 mars, la série des biographies des saints présents par leur icône dans notre sanctuaire.

 

Ce Joseph  est bien connu des chrétiens orthodoxes par le tropaire qui accompagne la procession de l'épitaphios lors de la mise au tombeau du Sauveur lors de l'office du soir du Vendredi Saint:

 

"Le noble Joseph descendit du bois ton corps très pur, l'enveloppa d'un linceul immaculé et couvert d'aromates, il le déposa dans un sépulcre neuf.

 

Joseph d'Arimathie est aussi un des héros de la quête du graal. Les historiens de la littérature, en étudiant la geste du graal, se posent la question de savoir ce qui peut appartenir à l'histoire et relève du roman.

 

Les grands et surtout les petits bretons grâce à l'iconographie des enclos paroissiaux sont plus familiarisés avec la figure de saint Joseph d'Arimathie.

 

A notre tour de mieux saisir la personne de notre saint.

Pourquoi l'honorer dans notre Languedoc? Cela est peu connu: notre Joseph appartient aussi, avec Marie-Madeleine, les saintes Maries, Lazare, Maximin et Trophime, à la tradition provençale des amis du Seigneur débarquant sur le littoral.

 

  

 

Ce que disent les Ecritures:

 

Joseph d'Arimathie apparaît inopinément lors du récit de la passion. Ce notable juif, après avoir demandé le corps du supplicié à Pilate, le dépose dans son propre tombeau. Ayant accompli cet acte, il entre dans le silence et disparaît du récit des évangélistes canoniques.

 

 

 

Regardons tout de même, ce que nous pouvons comprendre de sa personnalité:

 

-Evangile selon saint Marc 15, 42-47    (rédigé probablement entre les années 65 et 70)

"Le soir étant déjà venu, comme c'était la Préparation, c'est-à-dire veille du sabbat, vint Joseph d'Arimathie, membre honoré du grand conseil, qui attendait, lui aussi, le royaume de Dieu. Il alla hardiment auprès de Pilate pour demander le corps de Jésus. Mais Pilate s'étonna qu'il fût déjà mort, fit venir le centurion, et lui demanda s'il y avait longtemps qu'il était mort. Renseigné par le centurion, il accorda le cadavre à Joseph. Ayant acheté un linceul, il le descendit, l'enveloppa dans le linceul, le déposa dans un sépulcre qui avait été taillé dans le roc, et il roula une pierre à l'entrée du sépulcre. Or Marie la Magdaléenne et Marie, mère de José, observaient où il était déposé".

Retenons que Joseph d'Arimathie est un notable, membre du Grand Conseil, qu'il attend la venue du Royaume. Ses traits de caractères sont la hardiesse et l'esprit d'initiative. Il accomplit les rites de sépulture avec simplicité sans parole inutile.

 

-Evangile selon saint Matthieu 27, 57-61   (rédigé probablement vers 70)

"Le soir venu, vint un homme riche d'Arimathie, nommé Joseph, qui lui aussi était devenu disciple de Jésus. Il alla trouver Pilate pour lui demander le corps de Jésus ; Pilate alors ordonna qu'on le lui remît.. Joseph prit le corps, l'enveloppa d'un linceul blanc, et le déposa dans son sépulcre neuf, qu'il avait fait tailler dans le roc; puis, ayant roulé une grosse pierre à l'entrée du sépulcre, il s'en alla. Or Marie la Magdaléenne et l'autre Marie étaient là, assises en face du tombeau".

Ce bref récit, nous apprend donc que son nom d'Arimathie, provient du lieu de son origine ou d'habitation. Nous laissons donc de côté les cogitations d'exégètes qui font dériver Arimathie de l'hébreu mathaïm "des morts". Joseph d'Arimathie deviendrait donc "Joseph de la colline des morts ", ce qui ferait de ce notable un fossoyeur! Curieux métier pour un membre éminent du Sanhédrin continuellement "impur" (inapte au Service divin et à aux rapports avec la communauté) par son contact avec les cadavres!

Tout ce que nous pouvons tirer de l'étymologie, c'est l'idée de hauteur.

Hauteur de son lieu de résidence certainement, hauteur de son esprit et courage, c'est évident.

Mathieu nous dit, sans plus, que Joseph était disciple du Messie Jésus. Il ajoute que le  sépulcre lui appartient et  précise qu'il n'a pas encore été utilisé.

 

-Evangile selon selon saint Luc 23, 50-56  (rédigé probablement dans les années 70,80)

"Et alors un homme, nommé Joseph, -qui était membre du conseil, homme bon et juste, il n'avait pas donné son assentiment à leur résolution ni à leur acte -, d'Arimathie, ville juive, qui attendait le royaume de Dieu, cet (homme) alla trouver Pilate pour lui demander le corps de Jésus; il le descendit, l'enveloppa d'un linceul, et le déposa dans un sépulcre taillé dans le roc, où personne n'avait encore été mis.

C'était le jour de Préparation, et le sabbat commençait. Ayant suivi (Joseph), les femmes qui étaient venues de la Galilée avec (Jésus) considérèrent le sépulcre et comment son corps (y) avait été déposé. S'en étant retournées, elles préparèrent des aromates et des parfums ; et, pendant le sabbat, elles demeurèrent en repos, selon le précepte".

Luc apporte une précision, cet homme membre du Grand Conseil du Sanhédrin est bon et juste, dans l'attente du Royaume, il n'a pas donné son accord à la décision du Sanhédrin de livrer Jésus à la mort.

 

-Evangile selon selon saint Jean 19,38-42       ( rédaction définitive probablement vers 90)

"Après cela, Joseph d'Arimathie, qui était disciple de Jésus, mais en secret par crainte des Juifs, demanda à Pilate d'enlever le corps de Jésus, et Pilate le permit. Il vint donc et enleva son corps. Nicodème, qui précédemment était venu vers lui de nuit, vint aussi, apportant un mélange de myrrhe et d'aloès, environ cent livres. Ils prirent donc le corps de Jésus et l'entourèrent de bandelettes avec les aromates, selon la manière d'ensevelir en usage chez les Juifs. Or, au lieu où il avait été crucifié, il y avait un jardin, et dans le jardin un sépulcre neuf, où personne n'avait encore été mis. C'est là, à raison de la Préparation des Juifs, le sépulcre étant proche, qu'ils mirent Jésus".

Jean ajoute au récit des synoptiques la présence de Nicodème qui apporte cent livres d'aromates (ce qui est considérable), la localisation du sépulcre dans un jardin.

Des pères ont mis ce jardin en relation avec le jardin d'Eden, le paradis qu'Adam a perdu et que le Sauveur réinvestit pour nous.

 

Ce que nous apprennent les textes anciens

 

"L'Evangile de Nicodème" inclus dans les "Actes de Pilate" nous propose d'autres renseignements. La rédaction définitive de ce texte apocryphe date probablement du 4è siècle. Il expose  avec force mots et détails, sans grand intérêt, le procès et la mort de Jésus, puis sa résurrection et son ascension. 

Les évangiles canoniques sont cités quasiment in extenso: dans son discours au sanhédrin, Nicodème insiste sur le fait que Jésus accomplit les prophéties de la Première Alliance. On raconte comment les membres du sanhédrin procèdent à l'arrestation de Joseph, son incarcération et, à l'image de la libération de Pierre dans les actes des apôtres, comment Joseph retrouve miraculeusement la liberté: les portes de sa prison fermées, l'apparition de Jésus, qui, pris pour Elie par Joseph, lui enseigne la résurrection.

Je n'y ai pas trouvé de mention du saint graal ni de ses voyages apostoliques ni de son trépas.

 

Une lettre d'un certain Lucien à l'évêque Jean de Jérusalem datée de 406, associe Nicodème, Trophime et Gamaliel. Nous ne savons pas précisément qui est ce Trophime.  Le  disciple de saint Paul laissé malade par l'apôtre à Millet près d'Ephèse -2 Timothée 4.20-,  celui-ci est à l'origine de l'émeute de Jérusalem, les judéens,  pensant que Paul l'avait introduit dans le temple et avait profané ainsi le Lieu Saint en raison de son incirconcision? - Actes 21.29-

Que fait-il en compagnie des membres du Sanhédrin Nicodème et Gamaliel? C'est peu plausible.

Quoi qu'il en soit, l'Eglise d'Arles, pour affirmer sa fondation apostolique, va faire le lien entre Trophime, Nicodème et Joseph d'Arimathie qui quitta la Provence pour la petite et grande Bretagne en traversant toute la France.

 

La tradition provençale, appuyé par un écrit de Raban Maur, évêque de Mayence au 9è siècle, inclut ces personnages dans l'arrivée miraculeuse des amis du Seigneur sur la côte provençale: plusieurs disciples vinrent partager le sort de Marie Madeleine et Lazare: les deux "soeurs" Marie Jacobé, mère de Jacques le Mineur, Marie Salomé, mère des apôtres Jacques et Jean, Maximin, Sidoine l'aveugle, et Joseph d’Arimathie "qui avait emporté le calice avec lequel le Christ célébra sa dernière Cène et dans lequel il recueillit son sang sur la croix": le Saint Graal.

 

 

 

Robert de Boron né à Boron (aujourd'hui dans le Territoire de Belfort), est un clerc ou un chevalier de Franche-Comté qui, semble-t-il, a participé aux croisades; il a  composé vers 1190  un roman en vers "Estoire dou Graal ou Joseph d’Arimathie. Il y christianise le cycle arthurien de Chrétien de Troyes, en y faisant entrer saint Joseph d'Arimathie, et en assimilant  le graal au saint calice, la coupe dans laquelle Jésus avait mangé et institué l'Eucharistie, le jour de la Sainte Cène, la même qui aurait servi à recueillir le sang jaillissant des plaies de Jésus crucifié. Quand, plus tard, Joseph fut jeté en prison, il aurait reçu des mains du Christ ressuscité lui-même le Graal, qu'il aurait gardé durant les nombreuses années de sa captivité. Imagination ou recueil par le croisé d'une tradition orientale?

 

Nicéphore Calliste, moine et historien byzantin (1350), dans un sermon sur sainte Marie-Madeleine déclare "qu'elle conserva comme relique, et porta avec elle au cours de ses voyages, une pierre de couleur rouge teintée du sang divin, fragment d'une dalle sur laquelle le corps du Sauveur avait été déposé après la descente de la Croix, pour être oint de parfums et enveloppé de son linceul par Joseph d'Arimathie".

 

Nous pouvons relier cette information avec la tradition provençale: en 1279, lors de la reconnaissance des reliques de Marie-Madeleine dans l'église de Saint Maximin, "on trouva près d'elles  une ampoule contenant des petits cailloux ramassés auprès de la croix et rougis du sang de Jésus".

 

La tradition britannique fait de saint Joseph un de ses premiers évangélisateurs.

Mort dans la paix du Christ vers 63, il est inhumé à Glastonbury,  abbaye et siège primatial.

                                                                                                             + E-P    juillet 2017

 

  

Bibliographie:

- un article très fouillé de wikipédia:

https://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_d%27Arimathie

- Joseph Gazay, études sur les légendes de sainte Marie Madeleine et Joseph d'Arimathie, annales du midi, 1939

 

Joseph d'Arimathie