In memoriam Sa Sainteté Abba Shénouda

 

Le 17 mars 2012, abba Shénouda III, 117 pape d'Alexandrie et patriarche de la prédication de saint Marc, a été appelé par le Seigneur dans sa Lumière, à 88 ans,  après 42 années de pontificat.

 

Abba Shénouda est une grande icône du ministère apostolique, sa personnalité a  marqué profondément le cours de l'histoire de l'Eglise copte-orthodoxe comme le montre la brève biographie ci-dessous.

                                                         

-Nazir Gayed Raphael est né le 3 août 1923 à Abnoub, province d'Assiout en Haute Egypte.

 

- Dès l'âge de seize ans, il se met au service de l'Eglise et enseigne la catéchèse à "l'école du dimanche" de l'église saint Antoine de Shoubra au Caire.

 

- 1947. Titulaire d'une licence d'histoire de la Faculté de lettres du Caire.

 

- 1948. Diplôme d'Archéologie et langues classiques

            Il participe en qualité d'officier de l'armée égyptienne à la première guerre israélo-arabe.

 

- 1949. Après une licence en théologie au séminaire copte orthodoxe du Caire, il est nommé professeur d'exégèse et de dogmatique.

 

- Juillet 1954. Il devient moine au monastère "des Syriens" dans le désert de Scété. Il reçoit alors le nom d'abouna Antonious. Il lui est confiée l'obédience de bibliothécaire, puis il se retire en ermite dans une grotte du désert.

                                                                  

- 1959. Sa Sainteté abba Cyrille, pape d'Alexandrie, l'appelle près de lui et lui confie les fonctions de secrétaire particulier.

 

- 1962. Sa Sainteté abba Cyrille le nomme directeur des Hautes Etudes Théologiques et l'ordonne évêque à ce titre.

 

- Octobre 1971. Il est élu 117è pape d'Alexandrie

                                                                       

 

- 14 novembre 1971, il est intronisé pape et patriarche d'Alexandrie, sous le nom de Shénouda III.  

Il met ses pas dans ceux de son prédécesseur, abba Cyrille, en poursuivant les relations de l’Eglise copte-orthodoxe avec les autres Eglises, l’affermissement de la vie monastique et une intense catéchèse dans les paroisses.

Lui-même, dès les premiers jours de son pontificat jusqu’à la semaine précédant son trépas, il s’adresse aux fidèles dans ses célèbres conférences du mercredi. La conférence est toujours précédée d’une série de questions réponses, où le pape captive l’attention des fidèles par le bon sens, la verve, l’humour non dénué de profondeur spirituelle. 

Pour faire connaître l’Eglise copte et affermir les fidèles émigrés, Abba Shénouda est le premier pape à entreprendre de nombreux voyages à l’étranger.

 

- 1972. Visite à Istanbul, au patriarche œcuménique Démétrios pour inaugurer le dialogue théologique avec les Eglises byzantines après une incompréhension de quinze siècles.

 

- Mai 1973. Visite à Rome auprès du pape Paul VI. Une importante déclaration commune de foi christologique des Eglises de Rome et d’Alexandrie est signée le 10 mai 1973 par les deux papes à l’issue de cette visite.  

Le RP Bernard Sesboué dans un article d’unité des chrétiens N°46, avril 1982, a souligné parfaitement la dimension primordiale de cette déclaration qui met un terme à l’accusation de monophysisme à l’endroit de l’Eglise copte et le soupçon de nestorianisme contre les Eglises chalcédoniennes par les coptes :

"  il s’agit d’une question de langage et non de foi christologique, mais encore, fallait-il pouvoir le reconnaître ensemble. Or le 10 mai 1973, le pape Shénouda d’Alexandrie et le pape Paul VI ont signé une déclaration commune qui me semble exemplaire dans l’ordre de la réconciliation doctrinale. <> On reconnaît mutuellement l’authenticité de la foi christologique de son partenaire en admettant une diversité de langage. <> Cet acte œcuménique constitue une référence importante pour l’interprétation des conciles : il nous est dit que nous sommes tenus aujourd’hui par le sens visé et affirmé par les conciles et non par les mots. Dans le dialogue œcuménique, ce fait est encore unique à ma connaissance ".

 

- 2 juin 1974: création du diocèse copte-orthodoxe de France et ordination de son premier évêque, abba Marcos, évêque de Toulon/Marseille, ordination du chorévêque de Paris, abba Athanasios.

 

- Visite du pape d'Alexandrie aux patriarches de Moscou et Roumanie.

 

- 1981- 1985. Abba Shénouda est assigné à résidence par le président Sadate au monastère saint Bishoï dans le Wadi Natroum. Cette relégation a donné aux monastères de Scété une force nouvelle qui depuis ne s'est pas atténuée.

 

- 1987. déclaration de foi christologique commune avec l'Eglise anglicane signée par l'archevêque de Canterbury Dr. R Runcie et le pape d'Alexandrie.

 

- 1988. Déclaration commune sur le mystère de l'incarnation du Logos à Rome.

   Abba Shénouda reçoit au Caire, Sa sainteté Démetrios, patriarche de Constantinople et se rend en Russie à l'occasion du millénaire de sa christianisation.

 

- juin 1989. Déclaration de foi christologique commune entre les Eglise byzantines chalcédoniennes et les Eglises Orientales (non chalcédoniennes) signée au monastère saint Bishoï.

 

- 1991, Abba Shénouda reçoit dans sa résidence du Caire le patriarche de Moscou, Sa Sainteté Alexis

                                                       

          Il est élu co-président du Conseil mondial des Eglises à Genève.

 

- 1992. Abba Shénouda reçoit dans sa résidence du Caire Sa Sainteté Bartholomée, patriarche de Constantinople.

 

- juin 1994. Institution de l'Eglise copte orthodoxe de France, ordination de son métropolite, abba Marcos, sur le siège de Toulon et de toute la France, ordination d'abba Athanasios, évêque auxiliaire. Parallèlement un diocèse français pour les arabophones est créé et administré par le patriarcat.

                                                         

- Février 1995. Premier voyage en France de Sa sainteté abba Shénouda pour la consécration de l'Eglise Sainte Marie et saint Marc de Chatenay Malabry.

                                                          

- Février 2000, abba Shénouda reçoit au Caire, le pape de Rome Jean-Paul II à l'occasion du voyage de ce dernier au cours du grand jubilé de l'Incarnation du Sauveur.

                                                           

 

- Octobre 2000, abba Shénouda reçoit à Paris le prix  de l'UNESCO Madanjeet Singh pour la promotion de la tolérance et de la non-violence. 

 

- La dernière décennie de sa vie, abba Shénouda entreprit de nombreux voyages aux U.S.A., au canada, en Europe, pour y consacrer des nouvelles églises et rencontrer les autorités civiles et religieuses. Il a reçu de nombreux doctorats honoris causa.

 

Il aimait retourner régulièrement dans son monastère saint Bishoï pour vivre sa vie de moine et se recueillir loin des soucis autant qu'il en était possible.

 

En Egypte, il encouragea la fondation ou le reconstruction de nombreux monastères. Outre son enseignement hebdomadaire dans la cathédrale du Caire, il est l'auteur de plus de soixante dix ouvrages. Ses relations avec les recteurs de la plus importante université islamique Al Azar furent cordiales.

                                                               

Ses derniers jours furent assombris par les exactions de fanatiques islamistes et la vague d'attentats contre les commununautés coptes d'Egypte.

Abba Shénouda s'est endormi dans la paix du Christ le 17 mars 2012. Il repose dans son monastère deir abba Bishoï.

 

La presse occidentale s'est montrée très critique sur sa réserve à propos du "printemps arabe" et la révolution égyptienne, elle a aussi  stigmatisé le patriarche des coptes à propos de ses décisions sur le divorce et la morale. Pour le premier sujet, l'histoire jugera. Quand au reste, on ne peut pas demander à un moine et un patriarche d'aller contre son interprétation des Ecritures et sa conscience pour plaire à l'opinion. D'autant qu'il est impossible d'exiger la reconnaissance du divorce comme un droit, celà ne peut être qu'une mesure d'Economie particulière. Abba Shénouda s'est démarqué de son prédécesseur sur la question du divorce , son successeur tranchera selon le pouvoir de lier ou délier.

 

Je confesse qu'abba Shénouda est la personnalité religieuse la plus importante que j'ai eu l'occasion de rencontrer.

Il savait recevoir avec simplicité et trouver les mots qui faisaient grandir son interlocuteur.

Ce fut un grand patriarche visionnaire des besoins de l'Eglise, un défenseur de la foi et aussi un ardent artisan de l'œcuménisme. Sa concentration dans la prière liturgique était impressionnante.

Il sut être le père de ses fidèles qui trouvaient toujours sa porte ouverte.

 

Abba Shénouda fut aimé autant qu'il aimait.

                                                                  

 

Demandons-lui d'intercéder pour nous auprès du Seigneur.

 

In memoriam abba Shénouda