COMMUNION à L’ESPRIT

 

 

La tradition patristique, suit l'enseignement de saint Paul en distinguant dans l'Eglise le grand corps du Logos dont le corps de Jésus ressuscité est la tête.

Saint Grégoire de Nysse nous dit que l'articulation entre le corps du Logos incarné et le corps mystique du Logos qui est son Eglise est assurée par l'Esprit Saint. Par le fait de la naissance dans la chair du Fils de Dieu devenu Fils d'Homme, toute l'humanité reçoit la puissance de devenir enfant de Dieu.

L’Esprit unit le corps personnel du Seigneur à son corps des fidèles, et unit l’un à l’autre les membres de la communauté.

 

La communion de l'humanité avec Dieu prend ses racines dans le mystère de la vie divine: elle commence par l’acte créateur de l’humanité par Dieu, s’épanouit par l’incarnation du Logos et la rédemption, elle s’achève par la déification c’est à dire par la communion intime de l’homme avec son Dieu, Trinité une. La communion des chrétiens n’est pas séparable de celle du Père, du Fils, du Saint Esprit.

 

L’unité de la création.

“Dieu dit: Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance”. (Gen. 1, 26)

C’est ainsi que commence la description de la création de l’homme.

Dans son ouvrage “de la création de l’homme”, saint Grégoire de Nysse nous donne un commentaire remarquable des premiers mots:

 

“ Quand le texte dit que <Dieu créa l’homme>, le caractère indéterminé de la formule désigne l’ensemble du genre humain; car la créature  dont il est ici question n’est pas appelée Adam (...) L’homme qui vient d’être créé ne porte pas tel ou tel nom; il est désigné du terme général qui s’applique à toute l’espèce.

Cette appellation générale, qui englobe toute l’humanité, nous amène à concevoir que par la prescience de la puissance divine, c’est l’ensemble de l’humanité qui est comprise dans cette création du premier homme. (...)

La plénitude (plérôme) de l’humanité est comme contenue dans un seul corps. (...) Il n’y a aucune différence entre l’homme qui apparaît à la création du monde, et celui qui viendra à l’achèvement de l’univers: (...) Parce que pour la puissance de Dieu,  il n’y a ni passé, ni futur; l’avenir comme le présent sont soumis à son activité qui enveloppe l’univers.” (1)

 

Dans un petit opuscule, “Ils ne sont pas trois dieux”, saint Grégoire précise:

 

Le mot homme désigne, en effet, non l’individu, mais la nature; or la nature est unique, identique à elle même, monade entièrement indivisible, elle ne pâtit pas en elle même de la multitude de ceux qui participent d’elle dans leur individualité.” (2)

 

Le programme de l’humanité est de réaliser l’unicité de chaque homme dans l’unité de la nature unique. De la nature unique procède la fraternité universelle, de la personne unique découle le respect de la dignité humaine.

Voici pour l’image. Il est aussi important de savoir où est la ressemblance?

Elle consiste en le fait que l’homme reçoit la possibilité de tout vouloir. Mais tout n’est pas bon, il y a donc des choses qu’il ne doit pas vouloir. La volonté de l’homme doit être comme celle de Dieu: créatrice du bon et du juste.

L’homme n’a pas suivi le plan de Dieu. Le péché est entré dans la création et l’unique volonté humaine a explosé en une multitude de volontés autonomes et opposées. On peut dire qu’alors la nature humaine fut blessée.

 

L’unité retrouvée en Christ.

Après avoir été annoncé par les prophètes, attendus par les justes, “ au milieu du silence, au milieu de la nuit, le Verbe, Seigneur, du ciel est descendu.” (Sagesse 18, 14.15)

En prenant la chair, de Marie la vierge, le Logos s’est uni le genre humain tout entier.

En assumant véritablement la nature humaine, le Christ donne à l’humanité un nouveau commencement. En Lui, l’homme séparé par le péché de la vie divine est relié de nouveau à son Dieu, Vie de toute vie, Amour de tout amour.

Par le simple fait d’avoir pris la nature humaine en une personne singulière divino-humaine, le Fils de Dieu est devenu le fils de l’homme récapitulant en lui l’espèce humaine tout entière selon son extension  universelle.

 

Il fallait ramener de la mort à la vie notre nature entière.(...) Dieu (...) s’est approché de la mort jusqu’à prendre contact avec notre dépouille et fournir à la nature, au moyen de son propre corps, le principe de la résurrection, en ressuscitant l’homme entier par sa puissance.(...) C’est de notre espèce que provenait la chair qui a reçu Dieu, cette chair qui fut élevée et soudée à la divinité par la résurrection.(...)

De même que dans notre corps l’action d’un de ses sens transmet la sensation au tout,  uni à la partie, ainsi toute la nature étant pour ainsi dire un seul être vivant, la résurrection d’une partie pénètre le tout, en se transmettant à l’ensemble, à cause de la continuité et de l’unité de notre nature.”

                                         Saint Grégoire de Nysse, catéchèse de la foi. (3)

 

C’est véritablement selon le mot de saint Grégoire “une immixtion du divin dans l’humain”.

La communion (koinonia) ainsi réalisée, conduit à une contagion qui envahit le corps de l’humanité à partir du corps du Messie.

La fin des temps peut commencer.

Elle peut se comparer à une sorte d’invasion lente et laborieuse de tous les individus de l’espèce par l’Esprit de Sainteté du Christ. Tous les hommes, bons ou mauvais, porteront en eux, une exigence de résurrection parce que la Vie est venue à la rencontre de la mort.

 

Tout l’homme, présent dans le Christ est sanctifié en Lui. Par le baptême, chaque personne individuelle reçoit les prémices, reste à faire que cette sainteté remplisse le cœur. A la communion, communication de l’Esprit, nous devons collaborer librement par la foi et les œuvres de la foi.

 

la déification.

L’Economie du Salut a son aboutissement dans l’accomplissement de la prière sacerdotale de Jésus prononcée à la veille de sa Pâque:

Ce n’est pas pour ceux là seulement que je prie, mais aussi pour ceux qui, par leur parole, croient en moi, afin que tous soient un. Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu’ils soient en nous eux aussi (...) Et moi la gloire que tu m’as donnée, je la leur ai donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un; moi en eux et toi en moi, pour qu’ils se trouvent consommés dans l’unité (...) pour que l’Amour dont tu m’as aimé soit en eux, et moi aussi en eux. (Jean 17, 2O-26)

Les chrétiens ont la communion parce qu’ils ont part à la communion totale du messie à la volonté de son Père. La communion du Père et du Fils est la source et le terme de la communion des croyants.

L’homme   nouveau est né de l’obéissance du Fils acceptant sur la croix de remettre son esprit à son Père. Le principe vital qui anime l’homme nouveau, c’est l’Esprit.

L’homme en communion au Christ en reçoit l’Esprit puissant qui l'a ressuscité, et il ne ”forme plus avec le Seigneur qu’un esprit unique” selon l’expression inouïe de 1 Corinth. 6, 17.

Adam a voulu s’approprier “l’haleine de vie”, il est devenu homme psychique. Le Christ ressuscité insuffle l’Esprit aux apôtres: désormais, l’homme devient spirituel, il reçoit en son esprit (noùs) le propre Esprit de Dieu.

 

                                                                                       E-P

 Bibliographie:   

1. Chapitre 16, traduction  Guillaumin, P. 99; collection les pères dans la foi

2. PG. 45 col. 12O sq.                

 3. P.G. 45 Col 8O (ou trad. Maignan, les pères dans la foi p. 82, non utilisée ici

 

 lettre de saint Elie N°49  Décembre 1992

 

 

 

 

'incarnation du logos selon saint Grégoire de Nyss