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Eglise Orthodoxe

 

INTRODUCTION à l'ORTHODOXIE

 

1. la vie chrétienne

Les pères apostoliques et les apologistes entretenaient la mémoire vivante du Seigneur. Et à leur suite, un Clément d'Alexandrie, un Origène, un Irénée, un Athanase, ne détenaient pas des « textes » mais la foi même, et transmettaient sans en renverser une seule goutte, ce Calice de Vie aux chercheurs de Dieu. Nous aussi, nous recevons cet héritage dans la tradition de notre belle Eglise orthodoxe.

 

 L'orthodoxie est l'Art de vivre en chrétien dans l'esprit de liberté et de beauté. "Viens et vois" dit le Seigneur à tout homme de bonne volonté. Car l'Orthodoxie est la forme du christianisme la moins traduisible en concepts.

Et si notre Eglise copte orthodoxe semble de prime abord archaïque et primaire, c'est qu'elle est très proche des sources, de l'origine judéo-chrétienne, évangélique.

 

Sa spiritualité, son culte, sa prière, son âme même, remontent   à la piété pharaonique, aux patriarches, à Moïse et Aaron, au culte du temple à Jérusalem, aux prières de la synagogue,  aux apôtres, aux chrétiens des premières généra­tions.

Celui qui veut sans préjugés pénétrer le monde orthodoxe, surtout celui de la tradition alexandrine, découvre aisément ce christianisme des origines, enrichi par le vécu de longues générations, mais toujours nourri de la même et unique racine enfoncée dans le cep de la vigne du Seigneur et transmise par la tradition apostolique.

Pour définir la tradition apostolique, le mot le plus approprié est "Synergie" qui désigne la conception orthodoxe  des rapports entre la grâce et la liberté, il signifie coopération étroite mais incalculable. C'est Dieu qui donne les vertus, mais l'homme apporte la sueur de chacune de ses vertus. Ainsi le rapport entre l'Homme et Dieu est celui de collaboration, Dieu prenant l'initiative, l'homme adhérant au projet divin. Il faut donc discerner dans la Tradition la part de Dieu, immuable, de la part des hommes, expression formelle.

 

Le Seigneur a parlé, a agit, s'est livré et il a quitté ce monde. Il a envoyé l'Intercesseur, l'Esprit de Vérité, et il n'est présent dans le monde jusqu'à sa fin que sous la forme cachée de l'Esprit qui le rend présent dans les Mystères.

L'épiclèse  ou invocation de l'Esprit, est la genèse de toute commu­nion avec le Christ et le Père. Entre la Parole de Dieu et la réponse humaine, entre le Logos et l'homme se pose l'Esprit qui montre et accomplit.

 

2. La théologie patristique

La foi orthodoxe ne peut jamais se définir en termes d'une adhésion à un catalogue de croyances intellectuelles ou plus ou moins "mystiques", mais relève de l'évidence vécue, d'un certain  sens de Dieu. La foi est une rencontre, une amitié naissante, puis un amour sans partage et pourtant partagé.

Il faut insister sur ce caractère existentiel de la foi. Il dépasse l'intellectualisme purement conceptuel et correspond au terme très fort des Evangiles, la métanoïa, un changement radical d'état d'esprit.

La théologie comporte un élément doctrinal, la didascalie de l'Eglise, mais plus profondément elle écoute ses saints, s'instruit à leur colloque avec l'Esprit. Elle lit ce Mystère au-dedans de Dieu, car on ne peut jamais aller vers Dieu qu'en partant de Lui, ce qui supprime chez les Pères toute connais­sance extérieure, conceptuelle, et fait de la théologie avant tout la contemplation de la Trinité. Mais il ne suffit pas, précisent les Pères, de s'unir à la Trinité, il faut encore l'exprimer dans sa propre vie: le semblable est connu par le semblable.

En accord avec cet esprit réaliste, toutes les luttes dogmatiques des pères et des conciles s'essaient à préciser la voie salvatrice et réelle de l'union avec Dieu. C'est pour­quoi toute vie spirituelle est toujours structurée par les dogmes et modelée sur l'Opus Dei - liturgie de l'Eglise.

La théologie elle-même prend ce ton liturgique afin de tout rassembler en Christ, faire de l'univers le rendez-vous eucharistique. Les textes théologiques chez les Pères passent souvent directement aux textes de prière et de dialogue avec Dieu. Saint Isaac le Syrien voit dans ces instants "la flamme des choses", leur vérité cachée.

On comprend alors l'éton­nante définition de la théologie chez abba Evagre et saint Grégoire de Nysse: "Si tu es théologien, tu prieras vraiment, et, si tu pries vraiment, tu es théologien".

 Théologien donc est celui qui sait prier; et prier, ici, c'est être en communion incessante avec Dieu et pouvoir commenter les Ecritures saintes à la lumière de la présence vivante du Logos/Parole, de la proximité brûlante de l'Existant. Ce n'est point spéculation sur les textes, mais dialogue entre l'esprit humain et l'Esprit de Dieu.

" Il n'y a pas d'autre moyen de connaître Dieu que de vivre en Lui", dit Syméon ;

" Personne ne peut connaître Dieu si ce n'est Dieu lui-même qui enseigne ", enseigne saint Irénée.

" Dieu appelle béatitude non pas quelque connaissance sur lui, mais sa demeure dans l'homme ", saint Grégoire de Nysse.

 

L'Orthodoxie cherche à transcender les paroles des Ecritures pour aller vers Celui qui les a prononcées: "avant toute lecture, prie et supplie Dieu pour qu'il se révèle à toi". (saint Ephrem). Origène exhortait ses disciples à la prière pour obtenir les "baisers du Logos". "C'est l'Esprit, selon le juste Syméon le nouveau théologien, qui d'un érudit fait un théologien, car il s'agit non de s'instruire sur Dieu, mais de se remplir de Dieu". Les Pères connais­saient admirablement la culture de leur temps, se servaient de tout l'appareil technique de la pensée, mais ne s'arrêtaient jamais à la théologie des concepts et aspiraient à "la science qui devient amour". (saint Grégoire).

Toutefois, à l'opposé de la réception passive et quiétiste, "la vraie théologie libère des passions" dit saint Basile. C'est à ce dynamisme épiclétique (invocation incessante du Paraclet par la vie même d'un théologien) que répond "le don de l'Esprit qui révèle le sens de la théologie " (abba Evagre).

L'effort ascétique, de même que le tremblement devant le toucher au Saint de Dieu imposent ainsi à dépasser toute suffisance de la science purement encyclopédique. La théologie n'est pas l'affaire de la raison mais de l' intelligence du Christ par participation, or "le participé trans­forme en soi celui qui participe " (saint Grégoire de Nysse). Dans leur initiation à la théologie, les Pères posent l'ascèse comme préliminaire de la théologie et la prière comme un état normatif de l'intelligence.

3. Les deux systèmes théologiques

 

Tournée vers Dieu, la théologie nie avant tout, toute définition humaine, anthropomorphique: "De Dieu nous savons seulement qu'Il est, et non pas ce qu'Il est" (Denys l'aréopagite).

Dieu est Incon­naissable, car Incomparable, vu l'absence de toute échelle de comparaison. En le disant Créateur, nous désignons sa face tournée vers le monde, mais jamais Dieu en lui-même, dans son être essentiel. Dieu ne se révèle que dans ses manifestations dans le monde, dans ses attributs, dans ses manifestations ou théophanies.

 

 

La théologie classique, positive, procède par affirmations; en qualifiant Dieu de Bon, de Tout-Puissant, de juste, elle le limite et rend ainsi son propre enseignement incomplet, on y voit comme à travers un nuage de brume. Il faut la compléter par la  théologie négative  qui, elle, procède par oppositions à tout ce qui est ce monde: en tant que Source de tout ce qui est bon ou vivant, Dieu est au delà de notre notion de bonté, de vie.

La théologie positive ne s'en trouve pas dévalorisée mais ramenée à ses justes limites; quant à la théologie négative, elle nous avertit de ne pas perdre de vue la distance salutaire: "Les concepts créent les idoles de Dieu, dit saint Grégoire, l'émerveillement seul saisit quelque chose".  Elle rappelle que le conceptuel comme le sensible émoussent le sens de Dieu et induisent en erreur d'estimation: "Les mystères se révèlent dans les ténèbres plus que lumineuses du silence". Ce n'est point de l'agnosticisme car "grâce à cette inconnaissance, nous connaissons par delà toute intelligence". (saint Denys). Il ne s'agit pas de l'impuissance humaine seule, mais de l'inaccessible profondeur de Dieu en lui-même, L'obscurité inhérente à la foi désigne justement le mystère très paradoxal de la proximité de Dieu: plus Dieu est présent, et plus il est insaisissable et caché.

 

La théologie négative, ainsi, n'est pas un simple correctif ou le rappel à la prudence, mais une méthode autonome de la connaissance par participation. La prière liturgique: "Venez, fidèles, élevons nos coeurs et retrouvons-nous dans la chambre haute", parle de cette ascension de l'esprit par participation à l'ordre supérieur. Il ne s'agit nullement d'adapter les antinomies dogmatiques, mystères de Dieu, à notre logique pour en faire un  Dieu logique, une idole, mais de laisser notre être se transformer par l'Esprit saint. L'homme qui cherche Dieu est trouvé par Dieu, l'homme qui poursuit la Vérité est saisi par elle, transporté au niveau du Royaume.

Ce qui explique la place centrale de la liturgie en tant que "lieu théologique" où les mystères sont vécus et se révèlent en évidences inébranlables.

La mystique orthodoxe est avant tout et essentiellement vie en Dieu, participation et habitation de Dieu dans l'homme, communion. La communion en Dieu se vérifie par la communion des hommes et la compassion envers toute créature.

Dieu pour les Chrétiens Orientaux n'est pas tant puissance, pouvoir, autorité, jugement que source jaillissante de la Vie éternelle, source de miséricorde et d'amour.

 

 

4. La spiritualité orthodoxe

De la définition du but de la vie chrétienne, donnée magistra­lement par l'Apôtre Pierre: "afin que vous deveniez participants de la nature de Dieu" (2 Pierre. 1. 4), découle le type même de la spiritualité orthodoxe. Le commandement "soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait;, soyez saints comme Moi je suis saint", implique une relation d'appartenance à Dieu, la notion de mise à part, de consécration totale. Or, dans ce monde, tout ce qui est saint ou sacré n'est jamais tel de par sa propre nature : "le seul Saint est le Seigneur Jésus­-Christ", les fidèles, ses membres, ne sont saints que par participation. Ce qui explique toute une tradition patristique pour laquelle l'Incarnation aurait eu lieu en tout état de cause même en dehors de la chute,  mais conditionne l'ultime degré de la communion entre Dieu et l'homme et offre ainsi la pleine mesure de la partici­pation. C'est la règle d'or de la pensée des Pères: "Dieu se fait homme pour que l'homme devienne dieu", ce qui veut dire qu'il est invité à participer aux conditions de la vie divino-céleste.

A la différence de la théologie  de l'incarnation et de la croix, dite de "satisfaction", la conception orientale n'est pas centrée sur la réparation juridique de la faute, procurant le pardon, mais sur la réparation ontologique de la nature. Celle-ci récapitulée en Christ se répare, se guérit, et retrouve son vrai destin interrompu par la chute: celui de la theosis, déification.

 

Déification  terme difficile: et pourtant, à lui seul, il désigne l'aspiration la plus expressive de l'Orthodoxie. On pourrait dire aussi devenir Esprit, pénétration de l'être humain par les énergies divines au point qu'il devient le lieu de Dieu, sa vivante manifestation: Dieu appelle béatitude sa demeure dans l'homme  (Jean. 14. 23).

 

L'homme déifié  reçoit en don et par la grâce ce que Dieu a par nature: l'intégrité (la  chasteté au sens ontologique) et l'immortalité.

Dieu est lumière, et l'homme, par anticipation, se transmue en lumière. La sainteté se mesure ainsi à la densité du désir de Dieu, de la soif de Dieu, car Dieu peut tout, sauf contraindre l'homme à l'aimer; et c'est peut-être la meilleure justification du synergisme orthodoxe. Certes, l'homme n'est sauvé que par la grâce et par la foi, mais dans le contexte orthodoxe, ces termes acquièrent une tonalité différente. Les  vertus, selon les ascètes, ne sont pas autre chose que le dynamisme humain déclenché par la présence de Dieu. Les Pères affirment la liberté du désir du Salut et de la guérison, et laissent l'opération entièrement du côté de Dieu.

" Dieu est notre Créateur et Sauveur, il n'est pas celui qui mesure et pèse le prix des œuvres". (abba Marc l'Ermite). L'âme est tendue, non pas vers le Salut individuel, mais vers la réponse que Dieu attend de l'homme.

Au centre de la révélation du Dieu biblique se trouve non pas l'opposition seule de la grâce et du péché, du justicier et du coupable, mais surtout et essentiellement l'Incarnation: la rencontre et la communion entre l'amour descendant de Dieu et l'amour ascendant de l'homme.

 

C'est pourquoi l'homme ne se dirige pas vers le Tribunal de la réconciliation, mais vers la délivrance et la restauration de sa dignité d'enfant de Dieu. Ainsi, à l'opposé d'un jugement, le sacrement de la pénitence est conçu comme une thérapeutique spirituelle en vue de la guérison. De même l'eucharistie "remède d'immortalité" guérit la mort par la Vie

éternelle.

5. l'anthropologie, la prière, la vocation de l'humanité

Ce qui différencie l'homme des anges, c'est qu'il est à l'image de l'Incarnation, son spirituel s'incarne. L'ordre initial de cultiver le paradis de la joie s'ouvre sur la culture  qui se dépasse pour aboutir au culte, prélude déjà ici sur la terre de la liturgie céleste: Un saint n'est pas un sur­homme, mais celui qui trouve sa vérité en tant qu'être liturgique. La définition la plus exacte de l'homme est justement liturgique: c'est l'homme du Trisagion (Saint, Saint, saint), celui qui peut dire par tout son être:"Je chanterai mon Dieu tant que je vivrais". C'est pour répondre à cette vocation que l'homme est porteur d'Esprit: "Vous avez été scellés par le Saint-Esprit... Dieu s'est acquis (ces hommes scellés) pour la louange de sa gloire" (Eph. 1. 14). Il n'est plus celui qui a la prière, mais celui qui devient, qui est prière incarnée.

 

"Entre Dieu et l'homme existe la plus grande parenté" (abba Macaire) l'image de Dieu. C'est elle qui le prédestine à la déification.

L'anthropo­logie orientale ne peut être que l'ontologie de la déification. Elle n'est pas articulée sur la conquête du monde, mais sur la transfiguration qui est déjà  le rapt du Royaume de Dieu. C'est pourquoi l'Eglise sacre et sanctifie plus qu'elle n'enseigne et gouverne.

 

Un certain optimisme des ascètes place très haut la dignité de l'homme comme enfant de Dieu et nouvelle créature.

A l'opposé de toute théologie de la nature pure  formée au moment de la création, à laquelle la grâce s'ajouterait de l'extérieur, la grâce de l'adoption, pour les Orientaux, est impliquée dans l'acte créateur même, incorporée à l'homme dès sa création. L'homme, ainsi, n'est pas homme animal avec la vie spirituelle ajoutée par la grâce, mais homme spirituel chez lequel la vie animale n'est anormale que dans la mesure où elle a, au moment de la chute, prit le pas sur la vie guidée par l'Esprit. L'ascèse retrouve la vraie hiérarchie et conduit à la maîtrise du spirituel sur le matériel.

 

6. La mariologie

L'Incarnation fut non seulement l'oeuvre du Père par son Esprit très Saint, mais aussi l'oeuvre de la volonté et de la foi de la Vierge. Sans son consentement, sans le concours de sa foi, ce dessein était aussi irréalisable que sans l'intervention des trois Personnes divines. De même que le Logos voulait prendre chair, de même voulait-il que sa Mère l'enfantât librement, de son plein gré.

 

La parole du symbole de la foi "Né de l'Esprit saint et de la Vierge " désigne aussi pour les Pères le mystère de la seconde naissance de tout croyant né de la foi et de l'Esprit Saint. La  foi de tout fidèle s'enracine dans l'universelle valeur du grand acte de la Vierge. L'Annonciation, appelée "Fête de la Racine " (saint Jean Chrysos­tome), inaugure le Siècle à venir

 

Dans la réponse de la Vierge à l'annonce de l'ange Gabriel éclate la flamme pure de celui qui se donne et, par cela, est prêt à recevoir. L'action de l'Esprit à travers la lignée des  ancêtres  et la pureté du réceptacle, pleine de grâces, désarment le mal à leur point culminant; la chute reste un fait tangible mais devient infructueuse.

L'homme apporte au Temple son offrande, le pain et le vin, et Dieu, dans un geste royal, les transforme en sa chair et en son sang, en nourriture des dieux. L'humanité apporte l'offrande la plus pure, la Vierge et Dieu en fait le lieu de sa naissance, et la Mère de tous les vivants, Eve accomplie, Mère de la vie.

 

Toute l'humanité en la personne de la Vierge enfante Dieu, et, par cela, Marie est la Nouvelle Eve-Vie et sa protection maternelle, qui couvrait l'en­fant Jésus, couvre l'univers et tout homme. La parole de son Fils sur la Croix la constitue en cette dignité d'intercession maternelle.

La foi atteint toujours la résonance du Corps. En enfantant le Christ, la Théotokos, Mère de Dieu,  en tant que principe de la nativité, l'enfante pour tous et donc l'enfante aussi dans toute âme, c'est pourquoi l'Eglise est figurée par la Théotokos.

Saint Ambroise écrit: "chaque âme croyante, conçoit et enfante le Christ. Selon la foi, le Christ est le fruit de nous tous, nous sommes mères du Christ".  Ces paroles projettent une grande lumière sur la réponse du Seigneur à ceux qui lui annonçaient que sa mère et ses frères voulaient le voir (Luc 8.19-21) et écarte tout sens péjoratif, l'accent est placé non pas sur la Vierge, mais sur tout homme: "quiconque écoute la Parole de Dieu et la met en pratique, celui-là est ma mère" - à tout homme est donnée la grâce d'enfanter le Christ dans son âme, de s'identifier avec la Théotokos.

 

Le Christ est" le chemin " et  "la porte ", Dieu-homme, il est l'Unique. La Vierge est la première, elle devance l'humanité.

 

7. Le Théanthropos: le Dieu-Homme:

L'Eglise copte orthodoxe con­fesse dans des expressions différentes la même foi que les Églises dites chalcédoniennes. Cette foi proclamée au concile de Nicée, puis précisée à celui d'Ephèse, enseigne que Jésus-Christ, le Logos de Dieu incarné, est consubstantiel au Père et consubstantiel à l'homme, parfaitement homme et parfaitement Dieu, dans une par­faite union sans confusion. La liturgie de saint Basile le proclame solen­nellement dans la confession préparatoire à la communion: "je crois, je crois, je crois.  Je confesse jusqu'au dernier soupir que c'est le Corps vivifiant de Ton Fils Unique, Notre Seigneur, notre Dieu et Sauveur Jésus-christ. Il l'a pris de Notre Dame et Reine, Sainte Marie, Mère de Dieu. Il l'a fait un avec sa divinité sans mélange, sans confusion, et sans changement. Il a livré ce Corps pour nous sur l'arbre de la Sainte Croix par sa seule volonté et pour nous tous. Je crois, en vérité, que sa divinité n'a jamais été séparée de son humanité même l'espace d'un moment ou d'un clignement d'oeil."

La formule adoptée par saint Cyrille d'Alexandrie "une nature du Logos de Dieu fait chair", veut dire que le Logos, n'a pas seulement emprunté la chair, il s'est fait chair, et si parfaitement qu'à vouloir considérer, même en théorie, en lui l'humanité séparée de l'humanité on le représente comme il n'est pas. Assurément, en Christ, par cette unité, la nature divine ne subit aucun changement, et la nature humaine ne cesse de nous être parfaitement semblable. Il ne faut pas entendre nature (fusis  fusis) dans un sens philosophique de principe ontologique, mais plus simplement dans le sens commun de physique; le mot qui traduirait le mieux "nature" serait "réalité" comme saint Hilaire de Poitiers l'a  compris. C'est grosso modo le sens du concept théologique d'hypostase. Cyrille veut dire qu'en Christ, il n'y a qu'un seul agissant, le Dieu-homme Theantropos.

8. Le Christ & l'Eglise:

 

"L'Esprit souffle où il veut ", mais, avant tout, il repose sur l'humanité du Logos - l'Eglise. L'Eglise est alimentée par la source permanente de l'eucharistie et par le feu de la Pentecôte perpétuée dans tous les Mystères célébrés dans son sein.

 

La tradition orthodoxe place le commencement de l'Eglise au paradis. Dieu " venait dans la fraîcheur du soir" (Gen. 3. 8) pour converser avec l'homme. Cette image présente l'Eglise  comme le lieu de la communion entre Dieu et l'homme. Préfigurée et anticipée dans le régime de la Première Alliance, elle s'accomplit dans l'Incarnation et se dirige vers les Noces de l'Agneau de la Cité céleste.

"Mystère caché de toute éternité en Dieu" (Eph. 1. 4 et 3. 9), préexistant dans la Sagesse de Dieu, elle fait irruption dans le monde. Tout comme l'Agneau immolé dès la fondation du monde entre dans l'histoire et s'immole "sous Ponce Pilate " et  à Jérusalem, de même l'Eglise descend du ciel dans les langues de feu, entre dans l'histoire à Jérusalem et le jour de la Pentecôte.

L'ecclésiologie eucharistique. L'eucharistie n'est point un sacre­ment parmi les autres, mais leur source et leur achèvement. Sacrement des sacrements, elle exprime le coeur même de l'Eglise, sa communion. Tous les offices liturgiques ne sont qu'une anticipation du Jour du Seigneur, de son Repas, des Noces de l'Agneau.

Etre membre de l'Eglise, c'est avoir sa part dans la synaxe eucharistique, et l'excom­munication en prive.  Le texte des Actes 2. 47 : "Le Seigneur ajoutait chaque jour à l'Eglise ceux qui étaient sauvés" La traduction du grec epi to auto par "l'Eglise ", donne l'interprétation eucharistique de l'Eglise: "Le Seigneur ajoutait chaque jour les sauvés à l'ensemble des fidèles réunis en un même lieu et pour la même chose: L'eucharistie fait l'Eglise. Après la Pentecôte, l'Eglise est là où l'évêque opère la fraction du pain.

 

Un-unique, sainte:

L'ecclésiologie eucharistique, relevant de la théologie mystique, interprète le mot ecclesia dans le sens du peuple de Dieu réuni, non plus dans un lieu localisé, mais en Christ.

Toute la plénitude du corps est donnée dans l'eucharistie, ce qui signifie que toute réunion eucharistique correcte, c'est-à-dire, réunion dans la volonté exclusive d'accomplir le commandement du Seigneur "Faites ceci en mémoire de moi", et légitimée par la présence ou le mandat d'un évêque, signe de la communion apostolique, possède la plénitude de l'Eglise de Dieu en Christ. Toute Eglise est une manifestation locale de cette plénitude " catholique " de l'Eglise. De ce point de vue, il ne peut exister aucune partie de l'Eglise, celle-ci est indivisible et n'est jamais ni une somme ni une partie:«Là où est le Christ, là est l'Eglise " (saint Ignace).

Toute église locale est pleinement Eglise de Dieu.  

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Si " la Tête sera comblée seulement quand le corps sera rendu parfait" (saint Jean Chrysostome), déjà, dans le mystère eucharistique, les chrétiens ne sont pas unis seulement entre eux, mais ils sont un en Christ. "L'unité des frères" dont parlent les Actes présente une authentique christophanie - manifestation du Christ, le Christ visible. "C'est seulement dans la communauté des fidèles que le Fils de Dieu peut être trouvé et cela parce qu'il ne vit qu'au milieu de ceux qui sont unis" (Origène). D'emblée, la chrétienté est l'eucharistie, synaxe, communauté, Corps, Eglise.

L'aspect pneumatologique.

 Si la nature récapitulée en Christ est une, "des uns et des autres le Christ fait un seul Corps" (saint Jean Chrysostome), par contre, les personnes humaines sont multiples et chacune est unique. L'Esprit Saint se rapporte au principe personnel dans l'être humain et le fait épanouir dans la plénitude charismatique des dons. "Les langues de feu... se divisaient, et il s'en posa une sur chacun d'eux". précise le récit de la Pentecôte. "Nous sommes comme fondus en un seul Corps mais divisés en personnalités" (saint Cyrille d'Alexandrie). Au sein de l'unité en Christ, l'Esprit saint diversifie. Les deux sont complémentaires : "abreuvés de l'Esprit, nous buvons le Christ " (saint Athanase ).

9. La succession apostolique

Le principe qui permet de dire que l'Eglise, à tous les moments historiques est identique à elle-même, porte le nom de la "succession apostolique".  Succession  désigne la transmission ininterrompue de la Tradition à travers les siècles, jusqu'à la Fin. Apostolique désigne l'histoire transcendée par le Témoin. Il s'agit bien certainement des témoins de la vie, la mort et la résurrection du Christ, des apôtres envoyés dans le monde par le Sauveur pour y faire entendre sa Parole.

Mais en priorité,  le Grand témoin, Celui qui est envoyé pour nous faire connaître toutes choses de Dieu, c'est l'Esprit Saint, présent dans l'Eglise et sa seule norme.

L'Esprit Saint seul peut être considéré comme vicaire du Christ, car il atteste Sa présence, "prend en Lui ", et ainsi les deux parlent d'une seule voix et au moyen de l'Eglise, de son consensus.

 Ce qui veut dire que la grâce de l'Economie du Salut instituée par Dieu lui-même, n'opère qu'à l'intérieur de l'Eglise, que tout sacrement n'est efficace que comme sacrement de l'Eglise et dans l'Eglise. Ce qui ne veut pas dire aussi que Dieu limite sa grâce à l'appartenance visible à l'Eglise; C'est là un mystère profond: l'Eglise ordonne la grâce mais le Dieu vivant prend ce qui est de l'Eglise et le distribue à qui il veut, quand il veut, comme il veut. (anaphore de saint Jacques).

 

De même; la succession apostolique n'est pas un principe formel; hors de l'Eglise, elle est inefficace; dès que son porteur (évêque) se détache de la Source - l'Eglise -, elle tarit. On le voit bien, ce n'est pas le degré formel de la succession (d'avoir un évêque ordonné jadis ou par manigance ) qui valide le sacerdoce d'une Eglise, mais c'est la légitimité de son sacerdoce, de son lien avec l'Eglise, qui le situe à l'intérieur de la Succession apostolique et rend ses actes garantis devant Dieu et les hommes.

Au début du 2è. siècle, le passage à l'épiscopat est rapide, la succession sacerdotale reçoit sa forme précise et dès lors, la continuité historique de la communion est ininterrompue.

10.  Le sacerdoce

Le Prêtre absolu, le Christ ne transmet pas ses pouvoirs aux apôtres ni aux évêques, ce qui signifierait son absence. Il est bien présent jusqu'à la fin du monde dans son Eglise comme l'unique Sacrificateur. Il accomplit toutes choses par l'Esprit Saint et le ministère des prêtres.

"C'est le prêtre qui plonge le catéchumène dans l'eau et prononce les paroles, mais c'est Christ qui baptise".(Jean Chrysostome).

 

Tous les fidèles sont membres équivalents du peuple de Dieu. Christ seul est le Prêtre, tous sont prêtres par participation, quelques-uns sont évêques et prêtres par ministère pour servir le peuple sacerdotal.

La participation sacerdotale est donnée à tous, mais au moyen de deux modes: les deux sacerdoces: celui du Peuple royal qui offre l'Oblation et qui y communie, celui des prêtres qui présente les Oblations et sont les garants du Mystère.

11. Le dogme

Le dogme signifie vérité indiscutable,  la doctrine du Seigneur et des apôtres. Ancré dans les Ecritures et la Tradition, tout dogme doit toujours se référer aux paroles du Christ.

"Colonne et affirmation de la Vérité ", l'Eglise confesse les dogmes et témoigne de leur nature révélée

Avec l'ère apostolique, la Révélation est close, les dogmes n'ajou­teront aucun contenu nouveau aux Ecritures, mais formeront, comme dit saint Irénée, "l'analyse de ce qui a été dit ".

L'orthodoxie évite toute confusion entre le dogme et son interprétation théologique. Elle protège la plus grande liberté des opinions théologiques dans les cadres de l'unique Tradition. Aucun texte en dehors du Symbole de foi de Nicée et des définitions dogmatiques des trois conciles œcuméniques de Nicée, Constantinople, Ephèse, ne peut jamais prétendre à une valeur normative de l'expression de la foi.

12. Le droit canonique

L'unité de foi et de culte s'exprime différemment dans les formes locales. L'uniformité et la contrainte sont étrangères à l'esprit orthodoxe. Si les dogmes représentent l'immuable élément de la Vérité, les canons forment l'élément mobile des formes historiques. Leur but est d'aider les fidèles à vivre les vérités des dogmes à l'époque donnée, et dans un contexte historique à trouver les expressions les plus correctes et les plus conformes à la confession de l'Eglise. Beaucoup de canons sont de circonstances. La conscience canonique cherchera à tout moment non pas les formes révolues, mais l'esprit apostolique qui les a animées. L'objectif et la raison d'être du droit canon sont le "vivre ensemble" et proposer les remèdes concrets du Salut. Dans un certain sens, face aux désordres et aux fautes, le canon est Economie, bonne gestion de la maison de Dieu. Il existe aussi une Economie canonique qui lève le poids du canon, si l'application stricte de celui-ci risque de porter atteinte à la vie. Cette Economie est une mesure personnelle et ne saurait faire jurisprudence, ni devenir une règle normative.

13. Les Ecritures:

 

La Bible et la Tradition. Avant d'être consignée dans le canon des Livres saints, la Parole du Christ a été reçue sous la forme de la tradition orale. C'est l'Eglise qui détermine et fixe les écrits inspirés et y met le sceau d'authenticité. La Bible est donnée à l'Eglise, on ne peut donc jamais l'emporter hors de l'Eglise, sans risquer de la déformer. Le témoignage intérieur de l'Esprit Saint portant sur le commentaire de la Parole s'exerce toujours dans la catholicité de la conscience du Corps, jamais individuellement. Les Ecritures, le dogme, la pensée patristique, la liturgie, l'icône, forment une sphère vivante, dynamique, un milieu de résonance, venant de la même source d'inspiration: La Tradition apostolique portée par l'Esprit Saint.

La tradition développe  l'instinct d'orthodoxie  par appropriation de l'expérience du passé où l'Esprit a parlé et qui guidera les pas au dedans du consensus des pères. Dans la  Tradition reçue et transmise, c'est le Christ lui-même qui commente sans cesse ses propres paroles et l'Esprit saint les rend aujourd'hui Paroles de Vie.

 

La Bible est la forme humaine de la Parole divine. L'écrivain sacré ne devient pas un médium, il n'écrit pas sous la dictée de Dieu. A côté de l'inspiration divine, il y a les contingences historiques, le prisme humain qui justifie tout le travail scientifique sur le texte et la nécessaire prise en compte du contexte historique, sociologique et linguistique.

14. La tradition

La fidélité sans réserves aux dogmes s'accorde avec la liberté des opinions théologiques. L'Orthodoxie est réfractaire aux définitions dogmatiques qui ne sont pas absolument nécessaires d'où le minimum de dogmes et l'illimité de theologoumena (opinions)  "Dans les choses sûres, l'unité, dans le doute, la liberté, en toutes choses, la charité" (Augustin) reste sa règle d'or.

A côté des dogmes, l'Eglise possède un arsenal théologique et catéchétique qui sans posséder l'armature dogmatique des définitions conciliaires font partie de la Vérité transmise, c'est notamment le cas des textes de la liturgie, lieu théologique par excellence.

 

La Tradition est la conscience de l'Eglise d'être ce lieu: "gardez les enseignements que nous vous avons transmis, soit de vive voix, soit par lettre" (2 Th. 2.16; 2.13-14).

 


 

Avec notre grand saint Irénée, évêque de Lyon, voici ce qu'il faut savoir de la Tradition apostolique transmise par la

"Prédication des apôtres":

Tout commence au baptême

Le traité de notre père saint Irénée la "Prédication apostolique" s'ouvre et s'achève sur le bap­tême et la Trinité pour être fidèle au commandement du Seigneur "19 Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, 20 leur apprenant à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous toujours jusqu'à l'achèvement du temps."

Le baptême est véritablement une naissance au mystère de Dieu: nous y découvrons notre Père, par son Fils, Jésus, dans l'illumination de l'Esprit saint.

 

 

7. Lors de notre nouvelle naissance, le baptême nous fait renaître en Dieu le Père, par la médiation de son Fils, dans le Saint-Esprit. Car ceux qui portent l'Esprit de Dieu sont amenés au Logos, c'est-à-dire au Fils, et le Fils les prend et les offre à son Père, et le Père leur communique l'incorruptibilité. <> la connaissance du Père, c'est le Fils, et la connaissance du Fils de Dieu s'obtient par le moyen de l'Esprit Saint; mais c'est le Fils qui, par ministère, distribue l'Esprit, selon le bon plaisir du Père, à ceux que le Père veut et comme le Père le veut.

 

Inaccessible, Dieu se dévoile pour permettre à l'homme de l'appréhender pour devenir capable "de le porter ".

L'homme de lui-même ne peut voir Dieu mais Dieu, s'il le veut se fait découvrir par les hommes, par ceux qu'il veut, quand il veut, comme il veut, car Dieu peut tout. (Traité contre les Hérésies. IV, 20, 5 .)

 

Dieu ne se contente pas de se rendre accessible, il permet à l'homme de participer à sa splendeur et d'entrer en commu­nion avec lui.

De même que ceux qui voient la lumière sont baignés de lumière et participent à sa splendeur, ainsi ceux qui voient sont en Dieu et participent à sa splendeur, et cette splendeur leur donne la vie. contre les Hérésies IV, 20, 5.

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Comment voir Dieu ?

Dieu est Père et créateur. Il se découvre dans son oeuvre, l'univers, il y exprime sa tendresse paternelle.

4. Or, voici ce que nous assure la foi telle que les Anciens (presbytres), disciples des apôtres, nous l'ont transmise. Tout d'abord, elle nous oblige à nous rappeler que nous avons reçu le baptême pour la rémission des péchés, dans le Nom de Dieu le Père, et dans le Nom de Jésus-Christ, le Fils de Dieu, qui s'est incarné, est mort et est ressuscité, et dans l'Esprit-Saint de Dieu. Par [la foi] nous savons que ce baptême est le sceau de la vie éternelle et la régénération en Dieu, afin que nous soyons, non plus seulement les enfants des hommes mortels, mais aussi les enfants de ce Dieu éternel et indéfectible. Nous devons nous rappeler que Dieu est l'être éternel, qu'il est au-dessus de toutes les choses créées; tout est placé sous son domaine. Tout dépend de lui, a été créé par lui. <>

5. <> il y a un Dieu, Père, qui a fait et façonné toutes choses, qui a mené à l'existence, qui contient tout et que rien n'étreint. Ce tout comprend également l'uni­vers, et dans l'univers, l'homme. Or l'univers a été créé par Dieu.

Voici donc l'exposé de la doctrine: Un seul Dieu, le Père, incréé, invisible, créateur de tout, au-dessus duquel il n'y a pas d'autre Dieu. Ce Dieu est intelligence, et c'est pourquoi il a fait les créatures par le Logos. Et Dieu est esprit, aussi est-ce par l'Esprit qu'il a embelli toutes choses, comme dit le prophète : “Par la Parole du Seigneur, les cieux ont été créés, et dans son Esprit est toute leur force -Psaume32, 6-.

 

 

La création elle-même dont nous faisons partie nous atteste par le spectacle qu'elle met sous nos yeux que celui qui l'a faite et qui la gouverne est unique.

 

Dieu crée, agit par le Fils et l'Esprit, " les deux mains du Père ", pour écarter les intermédiaires et montrer l'intimité des rapports entre Dieu et son oeuvre.

Il a ses deux mains à lui, car depuis toujours il a auprès de lui le Logos et la Sagesse, le Fils et l'Esprit. C'est par eux et en eux qu'il a fait toutes choses, librement et en toute indépendance. H IV, 20, 1.

 

Ceci est particulièrement vrai de la création de l'homme et donne à la parole de la Genèse : Faisons l'homme à notre image, toute sa densité.

 

 

11. Quant à l'homme, Dieu l'a créé de ses propres mains, en prenant de la terre la plus fine et la plus pure, et en unissant avec mesure sa force à la terre. A cet effet, il imprima sa propre ressemblance à sa créature, afin que jusque dans son aspect extérieur elle soit l'image de Dieu. Car l'homme créé a été placé sur la terre pour y être l'image de Dieu. Pour donner la vie à l'homme, Dieu souffla sur son visage, un Esprit de Vie, pour le rendre semblable à lui, dans son âme et dans son corps .

L'homme fut créé libre et maître de ses actes, il fut destiné par ce même Dieu à commander à tout ce qui était sur la terre. Et cet univers immense, préparé par Dieu, avant de façonner l'homme, a été donné à l'homme comme un domaine pourvu de tout.

 

 

Le premier homme n'est pas un super homme comme l'ima­ginera plus tard Augustin mais un enfant, appelé à un devenir, qui lentement, progressivement, en se développant, parvient à l'âge adulte.

12. Or Dieu fit l'homme maître de la terre et de tout ce qu'elle renferme; il l'établit aussi secrètement maître des êtres qui devaient le servir. Mais tandis que ces der­niers étaient dans toute leur force, le maître, c'est-à-dire l'homme, était encore petit; c'était un enfant qui devait encore grandir pour atteindre sa perfection. Pour qu'il pût vivre et croître en bien-être, Dieu lui avait préparé une contrée meilleure que ce monde, au point de vue de l'air, de la beauté, de la lumière, de la nourriture, des plantes, des fruits et des eaux; rien ne lui manquait de ce qui convient pour les besoins de la vie. Et cet endroit se nommait le Paradis. Et ainsi le Paradis était beau et bon. Le Logos de Dieu s'y rendait tous les jours; il s'y promenait et s'entretenait avec l'homme, préfigurant les choses de l'avenir, c'est-à-dire qu'il habiterait et s'entre­tiendrait avec lui, et qu'il demeurerait avec les hommes pour leur enseigner la justice. Mais l'homme était un enfant; il n'avait pas encore le parfait usage de ses facultés, aussi fût-il facilement trompé par le séducteur.

 

La chute: enfantillage mais aussi rupture de communion entre Dieu et l'Homme qui bien qu'immature revendique l'autonomie.

15. Mais afin que l'homme ne se crût pas trop grand et ne s'enflât point d'orgueil, comme s'il n'avait pas de maître à cause du pouvoir reçu sur l'univers et de la liberté, face à Dieu, son créateur, pour qu'il ne dépassât point les bornes à lui posées, en se gonflant d'orgueil, jusqu'à se révolter contre Dieu, une loi lui fut donnée par Dieu, afin de lui apprendre qu'il avait un maître, le Sei­gneur de toutes choses.

Dieu lui traça quelques limites, afin que, s'il gardait les commandements de Dieu, il pût rester toujours dans l'état où il était, c'est-à-dire immortel; tandis que s'il n'y restait pas fidèle, il devînt sujet à la mort et retournât à la terre d'où il avait été tiré. 16. L'homme n'observa pas ce commandement mais il désobéit à Dieu.

 

 

Le Christ, Adam parfait

Seul Jésus-Christ, Fils de Dieu, est l'icône parfaite du Père. Le mystère de Jésus prend racine dans le mystère de Dieu, qu'il partage avec l'Esprit. Le Fils est auprès de Dieu avant que les choses furent créées, par sa médiation.

Il faut croire particulièrement qu'il y a un Fils de Dieu et qu'il existe non pas seulement au moment où il va apparaître au monde, mais même avant la création du monde. Moïse, qui le premier l'a prédit, s'exprime ainsi en hébreu: “Bereschith bara Eloïm basan bénouam samentharès”, ce qui signifie “Le Fils était au principe [de tout] ; Dieu créa ensuite le ciel et la terre (Génèse 1, 1)". C'est aussi ce que certifie le prophète Jérémie en ces termes: “Je t'ai engen­dré avant l'étoile du matin et ton nom est avant le soleil Ps 109, 3 ”, et c'est avant la création du monde, puisque les astres ont été formés en même temps que le monde. Et le même prophète dit encore: “Heureux celui qui était avant de devenir homme”. Pour Dieu, en effet, le Fils était au commencement avant la création du monde, mais pour nous, c'est depuis qu'il nous est apparu. Auparavant pour nous, il n'était pas, car nous ne le connaissions pas. Pour cela son disciple Jean nous déclare qu'il est le Fils de Dieu, qu'il est auprès du Père avant que le monde fût, que par lui toutes les créatures existent et affirme "  Dans le principe était le Logos; et le Logos était vers Dieu; et le Logos était Dieu. Il était au commencement auprès de Dieu.  Tout a été fait par lui, et sans lui pas une seule chose ne fut faite Il démontre évidemment que celui qui, au commencement, était le Logos auprès du Père, celui par qui tout a été fait, c'est bien le même qui est son Fils.

 

Le Christ, Dieu parfait, homme parfait

  Voici ce qu'attestent les Ecritures : le Christ est le Fils de Dieu qui existe avant toute la création. Sans cesser d'être avec le Père et auprès de lui, le Christ s'est de plus en plus rapproché et joint aux hommes, il est le Roi de l'univers, puisque le Père a mis tout ce qui existe sous sa domination, et il est le Sauveur de ceux qui croient en lui. <>  Ce même Christ qui, Logos de Dieu, était auprès du Père, devait s'incarner, se faire homme et subir la condition de l'humaine naissance; il devait naître d'une Vierge et vivre au milieu des hommes, son incarnation étant l'œuvre du Père de tous ; c'est ce qu'Isaïe annonce en ces termes: “C'est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe: Voici que la Vierge concevra et enfan­tera un fils et vous l'appellerez Emmanuel." Isaïe 7, 14-16.” <>

Le nouveau-né a un double nom: en hébreu Messie signifie Christ, c'est-à-dire l'Oint; Jésus veut dire Sau­veur ; et ces deux noms serviront à exprimer les œuvres qu'il doit accomplir. En effet, il est appelé Christ, parce que par son moyen le Père a oint et ordonné toutes choses, et qu'à son avènement comme homme, il a été oint par l'Esprit de Dieu, son Père. C'est d'ailleurs ce qu'il dit lui-même à son propre sujet par la bouche d'Isaïe: “L'Esprit du Seigneur est sur moi, c'est pourquoi il m'a oint pour prêcher aux pauvres" Isaïe 61, 1. Et il est Sauveur, parce qu'il est la cause du Salut de ceux que, de son temps, il a lui-même délivrés de toutes sortes de maux et de la mort, et parce qu'il est le donateur des biens à venir et du salut éternel pour ceux qui, venant après lui, croiront en lui. C'est donc pour cela qu'il est le Sauveur.

 

Dieu personne ne l'a jamais vu mais son Fils unique qui est dans le sein du Père l'a révélé. Ainsi dès les origines, le Fils est le Révélateur du Père, puisque dès le commen­cement il est avec le Père.

Le mystère du Christ est le centre de toute la pensée de l'évêque de Lyon. Il est le cœur lumineux à partir d'où tout s'éclaire, tout s'explique. La création trouve en lui son unité et son sens c'est-à-dire signification et direction.

Par l'incarnation, le Christ fait descendre Dieu dans l'homme par l'Esprit et monter l'homme jusqu'à Dieu, réalisant en lui-même l'oeuvre par lui modelée.

 

Le Fils révèle le Père aux hommes

Le Fils dévoile tout, au long de l'histoire et de l'Ecriture. Il parle à Abraham, à Moïse, à David, par les prophètes.

Voilà pourquoi la Nouvelle Alliance est la clef de la Première: l'accomplissement dans le nouveau testament explique la figure de l'ancien.

 

De fait partout dans les Ecritures de Moïse est semé le Fils de Dieu: tantôt il s'entretient avec Abraham, tantôt il donne à Noé les dimensions de l'arche, tantôt il cherche Adam. H IV, 10, 1.

La pédagogie de Dieu prépare de la sorte progressivement I'humanité et le peuple choisi à cet effet: accueillir son Dieu et entrer en communion avec lui.

 

Ainsi Dieu, dès le commencement a modelé l'homme en vue de ses dons, il a choisi les patriarches en vue de leur Salut. Il formait d'avance le peuple pour apprendre à ceux qui l'ignorent à le suivre. Il préparait les prophètes pour habituer l'homme sur la terre à porter son Esprit et à posséder la communion avec Dieu. H IV, 14, 2.

L'expérience humaine du Fils

Dans un corps et une vie d'homme, le Fils de Dieu fait l'expérience de tous les âges de l'existence. Il récapitule en même temps toute la longueur de l'histoire des hommes, avec ses joies et ses échecs, ses pesanteurs et son attente.

Ainsi donc Dieu le Père, plein de miséricorde, nous envoya le Logos, créateur, descendu pour nous sauver. Il s'est manifesté à nous aux lieux mêmes où nous avons perdu la vie et a brisé les liens dans lesquels nous étions engagés. Sa lumière nous est apparue, elle a dissipé les ténèbres de notre prison et elle a sanctifié notre naissance, abolissant la mort et rompant les chaînes mêmes dans lesquelles nous étions enlacés. Et en opérant sa propre résurrection, il est devenu lui-même le premier-né d'entre les morts, il a ressuscité en lui l'homme déchu et l'a fait monter jusqu'au plus haut des cieux, jusqu'à la droite de la gloire du Père. <>  Voilà ce que notre Seigneur Jésus-Christ a véri­tablement accompli, en opérant glorieusement notre salut. Il nous ressuscite véritablement, en nous ramenant sains et saufs auprès du Père.<> . Le Logos de Dieu, ayant daigné se faire chair, s'est soumis à cette naissance pour nous, afin de montrer la résurrection de la chair et d'avoir la primauté sur tous au ciel. Car il est le premier-né au Conseil du Père, le Logos parfait, gouver­nant tout et réglant tout par lui-même sur la terre; il est le premier-né de la Vierge, homme juste, saint, pieux, bon, agréable à Dieu, parfait en tout, sauvant de l'enfer tous ceux qui marchent à sa suite: il est le premier-né d'entre les morts et le guide qui conduit à la vie de Dieu.

 

 

Le logos incarné a tout récapitulé en lui

Le maître mot de l'œuvre de saint Irénée est "récapituler", emprunté à saint Paul, qui signifie comme premier sens "rendre au corps de l'humanité sa tête, son chef", et aussi, intégrer dans son être, sa vie:

 Selon l'Esprit, il est Fils de Dieu, étant au commencement auprès de son Père, engendré avant la création du monde, et manifesté à tout l'univers comme homme à la fin des temps, lui le Logos de Dieu qui récapitule en lui-même tout ce qui est au ciel et sur la terre.

Lorsque le Fils de Dieu s'est incarné pour devenir homme, il a récapitulé en lui-même la longue chaîne des hommes et nous a procuré le Salut, en le ramassant dans sa chair, de sorte que ce que nous avions perdu en Adam - c'est-à-dire notre qualité d'image et de ressemblance de Dieu - nous pourrions le retrouver dans le Christ Jésus.

 

La Croix:

Le Logos Sauveur s'est fait homme, dans son statut hérité de la chute, (c'est le sens paulinien du mot "chair", pour indiquer la fragilité et l'inconstance)  et a accompli toute justice pour rendre à l'homme sa  propre unité et son Salut.

Il a donc pris lui aussi chair et sang pour récapituler en lui non quelque autre ouvrage mais l'ouvrage modelé par le Père à l'origine, et rechercher ce qui était perdu. C'est pourquoi l'apôtre dit dans son épître aux Colossiens:   "Vous avez été réconciliés en son corps de chair par le moyen de sa mort pour vous présenter devant les saints sans tache ni reproche." La chair du juste a réconcilié la chair prisonnière du péché et l'a réintroduite dans l'amitié de Dieu. H V, 14, 2.

 

Pour détruire la désobéissance originelle de l'homme qui s'était perpétré par l'arbre (de la connaissance), le Christ s'est fait obéissant jusqu'à la mort et à la mort de la croix, guérissant ainsi par l'obéissance la désobéissance accomplie par l'arbre. H V, 16, 1. P 34, 45.56.79.

 

Saint Irénée développe en même temps les dimensions cosmiques de la croix et du Salut. Ce qui lui permet d'affirmer avec grande spontanéité l'universalité du Salut.

 

Logos tout-puissant de Dieu, sa présence invisible s'étend à la création entière et en soutient la longueur, la largeur, la hauteur et la profondeur: tout est gouverné par le Logos de Dieu. Il a été crucifié, lui le Fils de Dieu, en ces quatre dimensions, lui dont l'univers portait déjà l'empreinte cruciforme. S'étant rendu visible, il devait nécessairement manifester de manière sensible, sur la croix, son action invisible. Car c'est lui qui illumine les hauteurs, c'est-à-dire les cieux, qui scrute les profondeurs de la terre ; il parcourt l'étendue de l'Orient à l'Occident, il atteint l'immense espace du Nord au Midi, et appelle à la connaissance de son Père les hommes partout dis­persés.

 

Salut qui s'étend à la totalité des hommes, à travers la longueur de l'histoire, à la création tout entière dans la totalité de ses composantes.

 

L'homme vivant, gloire de Dieu

Avec le thème de la récapitulation de tout en Christ, saint Irénée reste sensible au principe de réalité, c'est à dire atteindre l'humanité dans toutes ses conditions tangibles.

Le Logos de Dieu nous a porté la grâce du Père. Il a montré Dieu aux hommes et l'homme à Dieu, tout en sauvegardant l'invisibilité du Père pour que l'homme ne perde pas le sens de Dieu mais sache sans cesse progresser vers lui. En même temps il a rendu perceptible Dieu aux hommes par de multiples dispositions de peur que l'homme, privé totalement de Dieu n'en perde jusqu'à l'existence. Car la gloire de Dieu, c'est l'homme vivant et la vie de l'homme, c'est la vision de Dieu. H III, 20, 7.

Nous voici revenu au signe du Baptême: La foi découvre au croyant que le baptême est le modelage de l'Homme Nouveau, par les deux mains de Dieu, le Fils et l'Esprit. Le baptême non seulement nous découvre cette dimen­sion trinitaire mais nous révèle le caractère de l'image trinitaire en nous.

En nous tous l'Esprit crie : Abba, Père,  et façonne l'homme à la ressemblance de Dieu.

 

Un seul Dieu, le Père, incréé, invisible, créateur de tout, au-dessus duquel il n'y a pas d'autre Dieu. Ce Dieu est intelligence, et c'est pourquoi il a fait les créatures par le Logos. Et Dieu est esprit, aussi est-ce par l'Esprit qu'il a embelli toutes choses, comme dit le prophète : “ Par la Parole du Seigneur, les cieux ont été créés, et dans son Esprit est toute leur force -Psaume32, 6-.

C'est le Logos qui pose la base, c'est-à-dire qui travaille pour donner à l'être sa substance et le gratifie de l'existence, et c'est l'Esprit qui procure à ces différentes forces leur forme et leur beauté; c'est donc avec justesse et convenance que le Logos est appelé Fils, tandis que l'Esprit est appelé Sagesse de Dieu. Aussi l'apôtre Paul dit très justement: “Un seul Dieu, le Père, qui est au-dessus de tous, et par tous et en nous tous ”-Ephésiens 4, 6-.  En effet, celui qui est au-dessus de tous, c'est le Père; mais celui qui est avec tous, c'est le Logos, puisque par son moyen tout a été fait par le Père; et celui qui est en nous tous, c'est l'Esprit, qui crie: “ Abba, Père ! ” -Galates 4, 6- et qui façonne l'homme à la ressemblance de Dieu.

 

L'itinéraire vers Dieu

Telle est la magnanimité de Dieu. Il a fait en sorte que l'homme passe par toutes les étapes. Qu'il fasse l'expérience de ses exigences avant de parvenir à la résurrection d'entre les morts. Qu'il apprenne d'expérience de quel mal il a été délivré et garde à Dieu une continuelle action de grâces. Doté par lui de l'incorruptibilité, qu'il lui en témoigne d'autant plus d'amour. Car la gloire de l'homme c'est Dieu mais le chef-d'oeuvre de toute la sagesse, de toute la puis­sance, c'est l'homme. H III, 20, 2.

La gloire de Dieu possède une place centrale dans l'enseignement des pères, saint Irénée nous montre comment rendre à Dieu le culte véritable.  La Glorification de Dieu est rendue par toute l'échelle des êtres, au sommet desquels Irénée place le Logos et la Sagesse, qu'il compare aux Chérubins et aux Séraphins, qui par leurs chants célèbrent Dieu. Adoration qui s'exprime dans le culte universel, culte céleste qui se continue par le culte rendu par l'homme. Culte que nous lui devons jour et nuit.

10. Or Dieu est glorifié par son Logos, qui est son Fils éternel; et par l'Esprit Saint, qui est la Sagesse du Père de tous. Et leurs puissances qu'on appelle Chérubins et Séraphins, glorifient Dieu par leur chant sans fin; et toutes les créatures célestes doivent rendre gloire à Dieu, le Père de tous. C'est lui qui, par son Logos, a composé le monde entier et à ce monde appartiennent aussi des anges. Il a donné au monde entier des lois pour que chaque être se tînt à sa place sans dépasser les limites fixées par Dieu, et accomplît l'œuvre prescrite à chacun d'eux. <> Nous sommes gratifiés d'un Souffle de Vie, et que nous devons à Dieu un culte d'ado­ration, le jour et la nuit.

Culte des sept cieux et des sept dons de l'Esprit dont le chandelier à sept branches est le symbole.

La vie dans l'Esprit

La foi semée en nous au baptême lève en charité, plénitude de la loi et perfection à réaliser.

Isaïe annonce que les hommes seront sauvés, non par les prescriptions multiples de la loi mais par la foi et la charité unies: “C'est une parole brève qui résume toute justice ; Dieu l'exécutera sur toute la terre "(Isaïe 10, 22).  Aussi l'apôtre ajoute-t-il: “La pléni­tude de la loi, c'est la charité". (Romains 13, 10). Qui aime Dieu accomplit la loi. Le Seigneur lui-même répond à qui l'interroge sur le premier commandement:“Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toutes tes forces. Le second commandement est semblable au pre­mier : Tu aimeras le prochain comme toi-même ".(Marc 12, 30).  La foi en Christ a fait croître notre amour envers Dieu et envers le prochain et nous a rendus pieux, justes et bons. Et c'est ainsi qu'il a accompli une parole brève, sur la surface de la terre.

 

La vie dans l'Esprit ne réside pas dans des prouesses  extraordinaires, ni une vie confite en dévotions mais par le progrès, de l'enfantillage à la dimension d'homme accompli. Qui fait l'ange fait la bête, qui veut devenir Dieu par la grâce doit d'abord être humain.

Il te faut d'abord garder ton rang d'homme et ensuite seulement recevoir en partage la gloire de Dieu. Ce n'est pas toi qui fais Dieu mais Dieu qui te fait. Si donc tu es l'ouvrage de Dieu, attends patiemment la main de l'artiste qui fait toutes choses en temps opportun. H IV, 39, 2.

 

Le fruit visible de l'Esprit invisible est de mûrir la chair et la rendre capable d'incorruptibilité.

L'Esprit se saisit de tout l'homme, jusqu'à le rendre incorruptible et lui promettre la résurrection de l'homme total: corps, âme et Esprit.

Qu'est-ce qui est semé en terre et y pourrit comme un grain de froment, sinon le corps de l'homme que l'on dépose dans cette même terre, qui reçoit la semence. "Semée dans la faiblesse, elle ressuscitera dans la puissance." La faiblesse dont il s'agit est celle de la chair, qui venue de la terre retourne à la terre, mais la puissance, qui est celle de Dieu, la ressuscitera d'entre les morts. Tels sont bien en effet les corps réceptacles de l'âme: ils meurent, puis ressuscitent par l'Esprit et deviennent corps spirituels,  afin de posséder par l'Esprit une vie qui demeure à jamais. H V, 7, 2.

 

L'Esprit dans l'Eglise

L'autre « main de Dieu », l'Esprit, communique son souffle à l'homme façonné. Il le consacre comme il a consacré le Christ. L'Esprit se répand sur le Christ comme un saint Chrême, mais aussi sur tous ses compagnons, qui participent à son Royaume.

Puisque le Père de tous est invisible et inaccessible aux êtres créés, ceux qui doivent s'approcher de Dieu reçoivent nécessairement par le Fils accès auprès du Père. Plus manifestement encore et plus clairement, David dit à propos du Père et du Fils: “Ton trône, ô Dieu, est établi pour les siècles des siècles. Tu as aimé la justice et haï l'iniquité. C'est pourquoi Dieu t'a oint d'une huile d'allégresse, de préférence à tes compagnons" (Ps 44, 7-8). ” Puisqu'il est Dieu, en effet, le Fils doit recevoir du Père, c'est-à-dire de Dieu, le trône du Royaume éternel et être sacré de l'huile d'onction, bien plus que ses compagnons. L'huile de l'onction, c'est l'Esprit; et ses compagnons, ce sont les prophètes, les justes, les apôtres et tous ceux qui reçoivent la partici­pation à son Royaume, c'est-à-dire tous ses disciples.

 

 

Du Christ l'onction de l'Esprit se communique à tout son corps ecclésial, à chacun en particulier mais uni à tous,  il y établit sa demeure.

Ainsi donc ceux qui croient, qui aiment le Seigneur et vivent dans la sainteté, la justice et la patience, le Dieu de tous accordera la vie éternelle par la résurrection des morts, et cela par les mérites de celui qui est mort et ressuscité. Jésus Christ, à qui il a donné la royauté univer­selle, l'autorité et le pouvoir de juger les vivants et les morts. Les apôtres, en prêchant la parole de la vérité les ont instruits à garder leur corps pur et leur âme sans souil­lure pour la résurrection.

Mais pour que les croyants se gardent tels, il faut que l'Esprit Saint reste étroitement uni à eux. Donné par Dieu au baptême, l'Esprit Saint demeure en celui qui le reçoit aussi longtemps qu'il vit dans la vérité et dans la sainteté, dans la justice et dans la patience. Car c'est aussi par la vertu de cet Esprit que les croyants ressusciteront, quand le corps sera de nouveau uni à l'âme et entrera dans le royaume de Dieu.

 

L'Esprit communique à l'Eglise son souffle et sa dimension, il l'anime et lui donne son parfum.

 

Là où est l'Eglise est l'Esprit de Dieu, et là où est l'Esprit de Dieu, là est l'Eglise et toute grâce.

La prédication de l'Eglise est la même partout et demeure égale à elle-même, appuyée sur toute l'économie divine ; elle réside à l'intérieur de notre foi que nous avons reçue de l'Eglise et que nous conservons, foi qui toujours sous l'action de l'Esprit de Dieu comme un parfum de prix conservé dans une amphore de qualité embaume le vase qui le contient. H III, 24, 1.

 

Le fruit visible de l'Esprit invisible est de mûrir la chair et de la rendre capable d'incorruptibilité. Irénée dit: "capable de Dieu". H V, 12, 4.

Lorsque l'homme aura été renouvelé, qu'il sera mûr pour l'incorruptibilité, au point de ne plus pouvoir vieillir, apparaîtra le ciel nouveau et la terre nouvelle, en lesquels l'homme nouveau demeurera dans un dialogue éternellement nouveau avec Dieu. H V, 36, 1.

Bibliographie:

* Paul Evdokimov, L'orthodoxie, Delachaux & Niestlé, 1965

* Saint Irénée de Lyon, La prédication apostolique,

                   traduction J. Bartoulot.  Les pères dans la foi, DDB 1977                                                                                                                              * Lettres de saint Elie, divers, Montpeyroux

* Catéchèses, site internet:         http//:coptica.free.fr

 

 

 

 


Lorsqu'un scribe demanda au Seigneur "ce qu'il devait faire pour gagner la vie éternelle" il reçut cette réponse: Qu'est-il écrit dans la Loi, qu'y lis-tu? Celui-ci répondit: Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit; et ton prochain comme toi-même. Tu as bien répondu dit Jésus; fais cela et tu vivras." Luc 10, 27 à 37 L'amour de Dieu et du prochain sont manifestement pour notre Sauveur la seule condition du Salut et de l'entrée dans le Royaume.

Bien sûr, celui qui est appelé à devenir l'ami de Dieu développe à partir de ces deux commandements qui ne font qu'un, d'autres exigences: la connaissance des mystères, l'ascèse, le témoignage, la justice de la vie et de la pensée. Notre Sauveur et notre Roi invite chacun et tous à l'idéal de la perfection évangélique mais met en garde contre la témérité spirituelle qui peut conduire à l'orgueil puis à la ruine. En Luc 14, 28 à 30, le Maître recommande à celui qui veut bâtir, de d'abord s'asseoir et de calculer la dépense de peur d'être incapable de l'achever. Il est nécessaire avant d'être reçu dans l'Eglise, une, sainte, catholique et apostolique de connaître et calculer "les dépenses" spirituelles sans lesquelles une conversion pourrait s'avérer plus nuisible que salutaire. Le chrétien orthodoxe doit parfaitement s'informer de la règle de foi de son Eglise et des exigences de vie qui en découlent.

En tout premier lieu, le chrétien orthodoxe doit se maintenir dans un état de vigilance spirituelle permanente et renoncer à son ancienne mentalité spirituelle ou critères mondains pour se mettre sous la conduite exclusive du Christ seul chef de l'Eglise orthodoxe. Il faut beaucoup de temps pour changer de mentalité, la foi orthodoxe n'est pas un catalogue de croyances mais Esprit et Vie. Même bien informé, le néophyte doit abandonner tout jugement de valeur sur les personnes, la doctrine, la liturgie, la vie spirituelle de son Eglise en attendant la pleine maturité de la grâce qui rend l'homme libre en Esprit et Vérité. Sans cet apprentissage de l'Esprit, ne pouvant réussir à trouver la paix, il se détourne plein d'aigreur et de désillusion de l'Eglise à laquelle il vient d'être admis comme cohéritier du Corps du Christ.

Le chrétien orthodoxe porte seul la pleine et entière responsabilité de ses faits et gestes. Il lui appartient de connaître les commandements divins, les recommandations de l'Eglise, et d'y conformer sa vie selon sa conscience. L'Eglise propose le chemin du Salut, une ascèse et un savoir vivre, mais n'impose aucun fardeau de l'extérieur. Cette route est difficile, car on se trouve confronté au choix de la liberté qui peut pencher vers la facilité ou même l'entrée dans la tentation. Les prêtres donneront des conseils selon l'expérience des saints mais n'imposeront jamais une opinion et ne prendront aucune décision à la place du chrétien.

La lecture quotidienne des Ecritures est fortement conseillée. L'Office divin est le modèle parfait de cette méditation de la Parole de Dieu: Psaumes, lecture d'un chapitre d'un livre de la Première Alliance (ancien testament), d'un écrit apostolique et péricope de l'Evangile. Devant Dieu, les vivants et les morts sont un seul peuple. La charité exige au moins que nous prions les uns pour les autres. On peut apporter les noms et des offrandes à la sainte Oblation. L'aumône permet de ne pas se dérober aux besoins des frères.

On ne peut être membre du Corps du Christ, qu'en étant membre d'une Eglise locale. La communauté paroissiale en est l'élément de base. Il faut connaître ses statuts et prendre part aux obligations communes, aux frais d'entretien et aux joies et aux peines de la communauté et de chacun. L'assistance régulière à la Sainte Oblation et aux offices divins est plus qu'un devoir, une nécessité vitale.

                                                                                                       + Eliyas-Patrick