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Clément d'Alexandrie |
PRAXIS &
THEORIA la vie spirituelle
selon saint Clément d'Alexandrie par abouna
Elias-Patrick, higoumène du sanctuaire du prophète Elie
à Montpeyroux. le
protreptique Biographie
de saint Clément d'Alexandrie: Notre
Clément d'Alexandrie possède un nom romain bien qu'il soit vraisemblablement né
à Athènes vers 150. Ses parents, païens, lui donnèrent une solide formation
littéraire. Grand
voyageur, déjà chrétien semble-t-il, Clément traversa l'Asie mineure,
Clément
conçoit le christianisme non seulement comme la vraie philosophie, mais bien
comme une réalité et une force mystérieuse capables de transformer l'homme tout
entier par la connaissance du "Dieu vivant qui appelle à
lui toute l'humanité par son Logos". Devenu à
son tour disdascale, Clément enseigne à Alexandrie jusqu'en 2O2. Il quitte la
grande ville pour échapper aux persécutions de Septime Sévère. Eusèbe écrit
qu'en 211, Clément "le bienheureux
prêtre" se
trouvait en Cappadoce " où il avait confirmé dans la
foi la communauté du Seigneur en faisant progresser la connaissance du
Christ". Il se
serait rendu ensuite à Antioche. Il mourut avant 215 sans avoir revu l'Egypte.
Les
synaxaires ne possèdent pas de notice sur Clément d'Alexandrie bien qu'en 215, saint Alexandre, évêque de
Cappadoce devenu évêque de Jérusalem par la volonté divine clairement exprimée,
écrive à Origène: "Nous connaissons ces
bienheureux pères qui ont fait route avant nous <> Pantène le vraiment
bienheureux et mon seigneur; et le saint Clément, qui a été mon seigneur
<> C'est par eux que je t'ai connu, le meilleur en toutes choses, mon
seigneur et mon frère. -2- Clément est
un éducateur né, il a toujours le souci de convaincre, d'éduquer et d'amener les
hommes à la perfection. Les problèmes philosophiques ne l'intéressent que dans
la mesure où ils ont une chance de transformer l'homme. Clément préfère par
dessus tout aborder les questions par le concret pour faire déboucher son
enseignement sur la vie. L'image du Pédagogue qu'il applique au Christ, lui convient aussi parfaitement.
-3- Le
christianisme de Clément est une vie nouvelle issue du Christ, éducateur de
l'humanité, bien au-delà de toute connaissance rationnelle et de toute morale
légaliste. La religion nouvelle transforme l'homme ancien par la communion avec
Dieu par la foi, l'espérance et l'amour. Le christianisme est la perfection de
tout l'humanisme. La vie en Christ, n'est pas culte extérieur mais véritable art
de vivre, et bien vivre. Sa figure du chrétien "gnostique" n'a rien d'un
intellectuel dans les nuages, il éprouve de la sympathie pour tout ce qui est
beau, rien de ce qui est humain lui est étranger; l'ultime degré de la
perfection est l'union à Dieu par la connaissance et l'amour.
Clément
nous a laissé essentiellement trois ouvrages composés:
"Le
"Protreptique; Exhortation aux grecs", "le
Pédagogue", et un
recueil de mélanges nommé "Stromates" ou "Tapisseries".
Une homélie
célèbre, "Quel riche peut être sauvé?" et des fragments des "hypotyposes"
complètent sa bibliographie. Le
Protreptique (c'est à dire le
Convertisseur) est un livre que
nous dirions de pré-catéchèse, destiné à un public non chrétien pour lui
présenter Le
Pédagogue est le livre du croyant. Il s'adresse aux convertis. C'est un manuel
d'éthique chrétienne, théorique et pratique. Il fournit un code des bienséances
en passant en revue tous les actes de la vie, les yeux fixés sur le Logos,
pédagogue et modèle du chrétien. Les
Stromates sont des notes de cours livrées en vrac destinées probablement à être
développées ultérieurement mais suffisamment élaborées pour être utiles aux
lecteurs. Clément y
dispose successivement ses idées sur le rapport entre la philosophie et
Il nous
faut mesurer la place exacte de saint Clément d'Alexandrie dans la théologie
chrétienne: A mon sens elle est d'une extrême importance pour ceux qui vivent
dans le monde. Son enseignement d'un équilibre parfait est un versant de la
montagne de la perfection chrétienne, l'autre étant représenté par l'ascèse monastique.
Le Protreptique, exhortation
aux grecs. L'ouvrage
est un vibrant appel à la conversion et à la vraie religion. Il s'adresse aux
grecs c'est à dire aux non juifs qui cherchent dans l'idéal philosophique une
connaissance du divin, une explication du cosmos et un art de vivre. Il s'ouvre
sur le chant nouveau du Logos succédant aux mystères païens.
"Ce
descendant de David, qui existait avant David, le Logos de Dieu, ayant méprisé
la lyre et la cithare, instruments sans âme, régla par l'Esprit Saint notre
monde et tout particulièrement ce microcosme, l'homme, âme et corps: il se sert
de cet instrument aux mille voix pour célébrer Dieu, et il chante lui-même en
accord avec cet instrument humain. <> Le Seigneur, envoyant son Souffle
dans ce bel instrument, qu'est l'homme le fit à son image; il est, lui aussi, un
instrument de Dieu, tout harmonie, accordé et saint, sagesse supraterrestre,
Logos céleste. <> Que veut cet instrument, le Logos de Dieu, le Seigneur
et son chant nouveau? <> Montrer Dieu aux hommes <> il aime les hommes <> ne
voulant tirer de nous qu'un avantage, notre salut.<> Prenez part de la
grâce". Les poètes
ont certes pour eux l'antiquité de leurs mythes, mais l'erreur est ancienne
tandis que Après avoir
chanté le Christ seul maître, lumière qui chasse toutes les ténèbres et toutes
les incertitudes, Clément examine les croyances et les cultes païens. Il reprend
à son compte la thèse de saint Justin: les sages de l'antiquité ont été éclairé
par le Logos, mais le mensonge est venu pervertir la religion.
Sans
concession et sans agressivité, Clément démontre les faiblesse du paganisme et
achemine son lecteur jusqu'à la rencontre de Dieu. Le monde a
besoin d'être éclairé, relevé, sauvé. La vérité totale ne se trouve que dans les
Ecritures et dans le Logos lui-même
que désormais les hommes peuvent écouter et contempler le visage éblouissant.
L'histoire
du monde toute entière doit converger vers l'incarnation du logos, le seul
véritable hiérophante.
Notes et
bibliographie: 1 Les mystères d'Eleusis tournaient autour
du mythe de Perséphone/Koré et de sa mère Déméter: Koré ayant été enlevée par
Hadès, dieu des enfers, Déméter s'enferma dans son sanctuaire d'Eleusis et
provoqua une terrible sécheresse. A la demande de Zeus, le souverain des enfers
consentit que Koré remontât sur terre tandis qu'elle passerait quatre mois de
l'année près de lui dans les enfers. Déméter est Par sa
demeure dans les enfers et celle dans l'Olympe, Koré annulait la distance
infranchissable entre le séjour des morts et celui des Dieux. Les
initiations d'Eleusis avaient pour but d'assurer la béatitude post-mortem.
"Heureux qui a vu cela avant
d'aller sous terre" s'exclamait Pindare. L'initiation se terminait dans une
grande lumière. Saint
Clément après avoir évoqué non sans réprobation, l'illumination des mystères
d'Eleusis nous dit que "le Christ est le véritable hiérophante".
Cf. Mircéa Eliade, histoire des
croyances et des idées religieuses, Payot, 1978 2
Eusèbe de Césarée, histoire ecclésiastique, traduction
Bardy, SC 41, 1955 3 A. Hamman, dictionnaire des pères de l'Eglise, DDB,
1977 4 Clément d'Alexandrie, Le Protreptique, traduct. Mondésert, SC
N°2, 1949 5 Pour le chrétien le
panthéisme (tout est Dieu ou tout est d'essence divine) est une colossale erreur
d'appréciation. Le mystique contemple avec piété le mystère de la création
récapitulée dans le Logos divin. Le pédagogue
Après avoir
présenté aux païens la foi dans son premier ouvrage "le protreptique" saint Clément propose
aux convertis dans "le
pédagogue" un manuel d'éthique
chrétienne. Il
s'attache à peindre l'action éducatrice du Logos incarné et flétrit avec force
les principaux vices de la société
aisée d'Alexandrie. Notre début du troisième millénaire, en matière de
vices, n'a rien à envier à celui du
premier, nous verrons même que sur un point précis, la situation est plus grave.
Clément, contrairement à ce qu'on pourrait penser à première vue n'est pas un
moraliste étriqué et ce qu'il propose est tout autre chose qu'une morale terre à
terre de ligues de vertus, son programme n'a qu'une seule ambition: la
ressemblance avec Dieu. Aller à
Dieu, ressembler à Dieu, vivre en Dieu, tel est le but de la vie humaine, nous
allons donc parcourir "le pédagogue" et voir comment Clément envisage la vie
chrétienne. Le Christ,
vrai pédagogue: Etre un
Homme, mieux un enfant de Dieu, ce
but est difficile à atteindre, nous avons tous besoin de maîtres qui nous
instruisent et surtout qui par leur exemple nous montrent la voie. Clément ne
refuse pas le titre de maîtres aux philosophes de l'antiquité, encore moins à
Moïse et aux prophètes, mais les chrétiens ont mieux encore, puisqu'ils peuvent
suivre les exemples du Logos incarné. Il est le premier chantre de l'imitatio
Christi, l'imitation de Jésus Christ;
notre modèle de vie chrétienne est celle du Christ.
Pour mettre
en exergue la fonction de pédagogue du Christ, Clément décline quelques titres
que l'on peut attribuer au Logos incarné
et explique le véritable esprit d'enfance. Surtout le
Logos est notre pédagogue: "Le Logos
règne sur toutes nos actions comme précepteur, nos passions, il les guérit comme
consolateur. Ce Logos ainsi multiplié, n'est qu'un seul et même Logos, arrachant
l'homme aux habitudes mondaines <> le conduisant à l'unique voie de salut
qui est la foi". chap. 1. "Notre pédagogue est semblable
à Dieu son père, dont il est le Fils impeccable, irrépréhensible. Son âme
n'est pas l'esclave des passions. C'est un Dieu revêtu de la forme humaine
<> soumis sans réserve à la volonté paternelle, Logos Dieu qui est dans le
Père, à la droite du Père, Dieu avec un corps. C'est une image pure et sans
tache, à la ressemblance de laquelle doivent tendre tous nos
efforts".
chap. 2.
Voici le modèle à imiter, le chrétien
doit tendre toute sa vie à se soumettre à la volonté paternelle à l'image du
Logos. Cette voie qui est celle de la croix, n'est pourtant pas un joug
insupportable car elle est la réponse à l'amour divin. "Dieu nous aime <>
puisque de son sein paternel, il envoie vers nous son Fils unique, cette source
inépuisable d'amour et de foi <> Il ne suffit pas d'observer combien il
est juste de payer de retour un Dieu dont l'amour nous conduit au souverain bien
et de conformer notre vie à ses commandements, mais de chercher à lui ressembler
de la manière la plus parfaite qu'il nous soit possible<>. Le Logos a été
fait chair pour mieux nous enseigner la pratique et la théorie de la vertu.
Qu'il soit notre unique loi; regardons ses préceptes et ses avis comme la voie
la plus courte et la plus directe pour nous conduire à l'éternité. Ses
commandements ne respirent que la persuasion, et la crainte en est bannie".
chap.3. Incarné pour se faire notre
pédagogue, le Logos devient notre unique instructeur, il est Les figures du Logos: Le Logos
est un mais son activité est multiple, il est
simultanément - face
de Dieu: "Le Logos est la face de
Dieu, il l'éclaire et nous la fait connaître." chap.
7 -
Sagesse créatrice et médecin: "Notre
pédagogue, est -
raison: "Tout ce qui
est contraire de la droite raison est péché. <> Le Fils de Dieu est la
raison même, la désobéissance envers lui produit nécessairement le péché, et
l'obéissance envers lui produit la vertu. La vertu est en effet, un mouvement
doux et régulier de l'âme, toujours soumis en toute circonstance à l'empire de
la raison. <> Le véritable devoir de l'homme doit donc être d'obéir à la
raison <> le but est de lui faire aimer et connaître la vérité. La fin de
la piété et de la religion est le repos éternel dont on jouit en possédant
Dieu".
chap.
13. Nos "rationalistes" modernes ainsi que
les dévots détracteurs de la raison seraient bien surpris d'entendre de la bouche de saint Clément un tel
éloge. Pour ne pas faire de contresens, il faut préciser qu'il ne s'agit pas de
la raison discutailleuse et soupçonneuse mais du bon vieux bon sens corrigé par
la réflexion sincère qui manque souvent aux savants scientifiques, aux
théologiens, aux politiciens et autres comités
d'éthique. -
général et capitaine de vaisseau: "Comme un
bon général gouverne sagement sa phalange et prend soin de la vie de chacun de
ses soldats, comme un sage pilote dirige le gouvernail de son navire de manière
à sauver tous ceux qui naviguent, ainsi le Logos Pédagogue, plein de sollicitude
pour ses enfants, les conduit sur une route qui doit assurer leur
salut".
chap.
7.
La figure
du pilote est bien connue, celle du général moins, ce texte explique peut-être
la curieuse mosaïque de Ravenne représentant le Christ revêtu de l'uniforme de
général romain? -
vigne: "Pour le peuple simple et
nouveau, c'est le Logos qui est sa vigne; comme la vigne produit le vin, le
Logos donne son sang; et de ces breuvages salutaires à l'homme, l'un nourrit son
corps, l'autre guérit son âme et la sauve". chap.5. Clément développe dans "le pédagogue"
une intéressante doctrine eucharistique, il ne dit pas tout sur le sujet mais ce
qu'il en dit exprime un aspect peu commun de la foi de l'Eglise: "Lorsque le Seigneur nous
dit: "mangez ma chair et buvez mon
sang", cette nourriture est une image évidente de la foi et de la promesse.
Par ce breuvage et cet aliment l'Eglise, semblable à un homme formé de plusieurs
membres est arrosée et solidifiée. Elle nourrit son corps et son âme: son corps
de foi, son âme d'espérance. Elle devient comme le Seigneur, qui est un composé
de chair et de sang. L'espérance est le sang de la foi". chap. 6. Un des fruits de la
communion selon la post-épiclèse de la liturgie de saint Basile est que les
participants deviennent un corps et un esprit dans l'espérance de trouver part
parmi les saints. Dans un passage un peu compliqué, saint Clément dit encore:
"Le Saint
Esprit, qui a formé la chair du Sauveur, est le symbole de la chair; le sang
nous désigne le Logos. <> Le Seigneur est l'union du Logos et de l'Esprit.
Le Seigneur qui est à la fois l'Esprit et le Logos, est la nourriture des
enfants. Cet aliment est notre Seigneur Jésus Christ, le Logos de Dieu; cet
aliment est l'Esprit fait chair, la chair céleste sanctifiée". chap.6. Il est difficile de suivre la pensée,
Clément parle probablement du Seigneur présent dans l'Eucharistie? Le Seigneur
ressuscité et eucharistie est parfaitement uni à l'Esprit saint et ses fidèles
communient au calice rempli de l'Esprit. Clément ajoute plus
loin: "Boire le sang de Jésus,
c'est participer à l'incorruptibilité du Seigneur. L'Esprit est la force du
Logos, comme le sang est la force de la chair. Comme le vin se mêle à l'eau,
l'Esprit est mêlé avec l'homme<>. Ce mystère sanctifie l'âme et le corps
de ceux qui y participent avec foi <>. L'Esprit, en effet s'y mêle à
l'âme, et le Logos à la chair". L.2, chap.13
Ce n'est
pas d'une clarté souveraine mais celui qui lit avec les yeux de l'homme
intérieur se souvient de la prière de communion de la liturgie de saint Basile.
-
pasteur: "Notre pédagogue c'est Jésus;
mais lui-même se donne lui-même le nom de pasteur. <> celui qui conduit les enfants doit être
regardé comme un pédagogue: c'est un pasteur qui gouverne les enfants.
chap 7
L'esprit
d'enfance: Les fidèles
du pasteur-pédagogue sont des enfants,
entre ses mains comme des nourrissons, nous devons nous laisser doucement
transformer à son image et grandir dans la confiance. C'est l'occasion pour
Clément de nous révéler ce qu'est le véritable esprit d'enfance:
"ce n'est
pas, comme plusieurs l'ont pensé, parce que les enfants sont incapables de
réfléchir et de faire usage de leur raison que le Seigneur nous les présente
comme modèles <>. Non cette interprétation est extrêmement vicieuse.
Depuis que nous sommes les enfants du Seigneur, nous ne nous traînons plus dans
la fange <>. Ne connaître que Dieu pour Père, être simple, ingénu,
innocent, sans artifice, sans détour,
tels sont les caractères de la véritable enfance. Aussi est-ce à ceux qui
sont déjà avancés dans la doctrine du Logos que le Seigneur ordonne de rejeter
loin d'eux tout souci importun des choses nécessaires à la vie, et d'imiter les
petits enfants qui laissent ce soin à leur père. <> L'enfant est
naturellement simple et doux, mais ceux qui sont enfants selon Dieu, ajoutent à
cette douceur, une simplicité qui ignore la ruse et la dissimulation, un coeur
plein de droiture et d'élévation <> l'absence de toute espèce de fiel et
de tout mélange de perversité. <> Nous trouvons dans la loi nouvelle une
source intarissable de vie, une jeunesse qui ne connaîtra jamais la vieillesse,
une vigueur sans cesse renaissante pour nous élever à la connaissance de Dieu,
une paix imperturbable. <> le Père commun de tous reçoit avec plaisir ceux
qui se réfugient dans son sein; Les voyants pleins de douceur et régénérés par
le Saint Esprit, il les adopte comme ses enfants, les aime, les secourt, combat
pour eux, les défend et leur donne le doux nom d'enfants". ch. 5. Bibliographie: * Clément
d'Alexandrie, le pédagogue,
traduction M. de Génoude, Paris 1839 (La
collection Sources Chrétiennes (S.C.) a consacré ses N° 10, 108 & 158 au Pédagogue, mais je n'ai pas eu
l'occasion de les consulter).
Le baptême,
la ressemblance à Dieu: Clément
nous a montré l'idéal de la vie chrétienne: la ressemblance à Dieu par
l'imitation de Jésus Christ dans un véritable esprit d'enfance spirituelle.
Après avoir ouvert le ciel pour décliner les titres du Logos et nous faire
savoir en quelle mesure nous sommes enfants de Dieu, il ne perd pas de vue que
ces mêmes enfants vivent dans le monde, soumis à la séduction de ce monde. Mais
avant de décrire les vices du monde et nous donner son manuel de bienséance
chrétienne, Clément nous encourage en nous désignant le commencement et la fin:
par son baptême, le chrétien possède une certaine perfection par la communion au
Saint Esprit. "Du moment
où nous fûmes régénérés, nous reçûmes cette perfection à laquelle tendaient tous
nos efforts; nous avons reçu la lumière, c'est à dire la connaissance de Dieu.
<> Baptisés, nous recevons la lumière; éclairés, nous sommes faits enfants
de Dieu, nous devenons parfaits; parfaits nous devenons immortels. <> On
appelle cette grâce, illumination, perfection, baptême.
Baptême,
parce qu'elle efface et lave les péchés; grâce, parce qu'elle nous guérit les
blessures de nos péchés; illumination parce qu'elle nous fait voir cette lumière
sainte et salutaire au travers de laquelle nous apercevons les choses divines;
perfection, parce qu'il ne manque rien à celui qui la reçoit. Que manque-t-il en
effet, à celui qui connaît Dieu.<>
Le Salut consiste à suivre Jésus Christ, parce qu'en lui est la vie.
<> Sa volonté est le salut de l'homme, et cette volonté s'appelle Eglise.
<> Ainsi le baptême, en nous lavant de nos péchés, qui sont comme
d'épaisses ténèbres, ouvre notre âme à l'esprit divin. L'oeil de notre âme
devient aussitôt clair et lucide; l'Esprit Saint descend en nous. <> Le
semblable cherche son semblable; ce qui est saint est naturellement porté à
aimer Celui qui est En quelques
mots, Clément expose toute la doctrine orthodoxe du baptême, bain de
régénération, illumination, communication du Saint Esprit, plénitude de la
grâce. Par le baptême tout est donné; comme dans l'enfant à naître se trouve la
plénitude de l'homme accompli, ainsi dans le baptême, l'homme nouveau déifié par
la présence de l'Esprit Saint est déjà là en puissance, il ne lui manque rien
pour accomplir son destin d'enfant de Dieu sauf d'exercer son libre arbitre et à
l'imitation de Christ soumettre sa volonté à celle du Père.
Curieusement, peut-être suivant la tradition alexandrine qui ne
dépend pas directement de saint Paul, Clément ne semble pas faire allusion à la
symbolique de la résurrection avec le Christ, au passage de la mort à la vie en
Christ, alors que tout son enseignement porte sur la "sequela Christi", la marche à la suite du
Christ. Saint
Clément ne se berce pas d'illusion,
le baptême n'est pas l'accomplissement mais le commencement de la lutte, il
ajoute: "Nous sommes parfaits autant
que nous pouvons l'être en ce monde.<> La foi est la perfection de la
doctrine ".
La
foi: Cette foi,
n'est pas synonyme de croyance en quelque chose mais fidélité, confiance en
"Désormais nous ne sommes plus
sous la férule de Pour saint
Clément, ce Logos pédagogue n'est pas une vue philosophique, une simple
idéologie lancée par un maître du passé, mais une personne vivante dont la vie
et l'enseignement perdure dans l'Eglise, c'est en elle que nous trouvons le
Logos véritable, la connaissance de Dieu et la paix céleste.
"Le seul
moyen de devenir parfaits est d'accepter Jésus-Christ pour notre chef, et de
faire partie de son Eglise. <> Nous trouvons dans Les
Ecritures: Les livres
saints de la première Alliance et même ceux de l'Alliance éternelle ne sont pas
toujours d'un abord facile, l'histoire sainte parait souvent chaotique, les
préceptes ont-ils un caractère universel ou de circonstance? Clément nous montre
comment Jésus, le divin pédagogue en parcourant les Ecritures en relativise certains et parmi une
multitude en choisit pour ses enfants pour que, sans joug inutile, ils aient la
vie en surabondance. Chaque état spirituel, chaque âge, chaque rang, y trouve
les instructions qui lui sont nécessaires. Pendant sa vie terrestre, Jésus n'a
pas voulu substituer une Torah à une autre et formaliser les règles de vie. Par
le sang de la croix, il s'est acquis un grand Corps dans lequel il réside,
"sa volonté est le salut de
l'homme, et cette volonté s'appelle Eglise". Chap. 6.
L'Eglise: L'Eglise
est présente à tous peuples, tous temps, toutes cultures et une avec le
Pédagogue céleste énonce à tous l'unique Parole de Vérité et les voies du Salut
en tenant compte des particularités des personnes, des lieux et des
temps. "Le maître
de la bonne doctrine est l'Eglise, l'épouse du Christ, à qui lui-même a remis sa
puissance, sa volonté, sa sagesse, sa doctrine et le pouvoir de nous sanctifier.
Attachons-nous de plus en plus au corps sacré de cette Eglise dont nous sommes
les membres <> adorons en elle cette grande Economie par laquelle Dieu, se
faisant homme, nous instruit, nous élève au rang de ses fils, nous ouvre les
cieux, et nous apprenant sur la terre qu'il est notre Père, le devient
réellement dans le ciel". L. 3, Chap.
12. Le péché,
l'ascèse: Si nous
avons tout reçu par et dans le baptême, qui restitue en nous l'image de Dieu qui
avait été altérée par le péché, nous devons atteindre la ressemblance parfaite
du Logos-Dieu qui est dans le Père par la tension de tous nos efforts:
"Faisons
tous nos efforts pour pécher le moins possible. Avant tout, il convient de nous
débarrasser des passions et des maladies de notre âme, il faut éviter de tomber
facilement dans l'habitude du péché. <>L'homme sage ne pèche jamais
volontairement mais il faut aussi éviter de tomber fréquemment dans les fautes
involontaires. Enfin il ne convient pas de rester longtemps dans l'état de
péché, mais faire retour au bien par la pénitence" L2, chap. 2.
Clément
nous révèle sa conception du péché,
elle est très proche de son
étymologie hébraïque: "rater la cible". Tout péché, dit-il, est un acte contre la
raison.
Pour
montrer l'attitude juste du chrétien face aux tentations du monde, Clément
propose une règle de vie, très
exigeante, (trop parfois quand il bannit tout plaisir même honnête), car son
modèle, la vie de Christ, est très élevé. Et surtout, la banalisation et la
généralisation des vices exigent une riposte vigoureuse.
"J'ai honte,
je l'avoue, d'entrer dans le détail de toutes les infâmes coutumes; <> Le
vice a désormais dépassé toute limite; il promène en public ses joies lascives
et insultantes, il coule à plein bords dans nos villes, il est la souveraineté
commune et universelle. <> La loi se tait sur les désordres, et se
prévalant de son silence, ils appellent facilité de moeurs ce qui est le plus
horrible excès de la criminelle impudicité. Ils violent la nature et se croient
innocents des souillures. Mais si la loi humaine se tait, la justice divine ne
se taira point. Ils appellent sur leur tête d'inévitables calamités". L. 3, Chap. 3.
Heureuse
époque, au moins la loi se taisait et ne validait pas la perversité.
La justice
divine: Ne faisons
pas de contresens sur la justice divine, il ne s'agit pas de promesses de
châtiments divins mais de ce qu'on peut appeler la loi de causalité: on ne viole
pas impunément la nature, on ne pollue pas sans réaction le subconscient, on ne
blesse pas mortellement l'âme sans mettre en péril ce qui fait l'homme, la
civilisation. Dieu gouverne le cosmos par le Logos et les logoi qui sont les
principes mettant en oeuvre le plan divin. Toute résistance au plan divin
engendrent naturellement souffrance dans la remise en ordre. Nous sommes dans
l'ordre du cosmos et non dans celui de la providence individuelle qui est une
autre question. Le logos
incarné a renouvelé la nature humaine et donne a chacun la possibilité de
recevoir en lui le feu divin, et,
par la liberté intérieure, de se délivrer de la mort pour recevoir
"comme ornement la durée sans
fin de l'éternité". L.3, chap. 1. "Le sang humain s'est mêlé et
communiqué à la nature divine du Logos par la grâce du Saint Esprit <>
Notre divin maître veut que nous soyons, sans faste et sans arrogance, sans
vaine gloire et sans péché, portant notre croix, uniquement occupés du soin de
notre Salut". L3, chap. 3. Le
Pédagogue, selon saint Clément, veut la pratique avant tout. La connaissance de
"Les
instructions de notre bon Pédagogue Jésus ne sont ni trop sévères, ni trop
indulgentes, en nous les donnant , il a soin de nous donner la force qui est
nécessaire pour les mettre en pratique. <> Par sa seule présence sur la
terre, changeant en une flamme pure et céleste tout ce qui a de terrestre en
lui, il a accompli dans toute son étendue cette magnifique promesse: Faisons
l'homme à notre image et à notre ressemblance. Oui, cet oracle de Dieu, c'est le
Christ qui l'a accompli, changeant le vieil homme en homme nouveau, la créature
mortelle en créature divine. Nous donc, enfants d'un bon Père, obéissons à sa Parole,
accomplissons sa volonté". chap.12. les
Stromates
Saint Clément d'Alexandrie, au début de son second grand traité (le
Pédagogue) nous donne le plan de
son projet de trilogie dont nous avons déjà étudié les deux premiers volets,
le Protreptique et le Pédagogue. " Le
Logos voulant achever étapes par étapes, notre Salut, suit une méthode
excellente, il exhorte (protrepon) d’abord à la conversion ; puis il
discipline (paidagogon) et finalement, il instruit (ekdidascon)".Péd.
1,1 Le "protreptique" a pour but de détacher les lecteurs du paganisme
pour les inviter à considérer la foi chrétienne. Le "Pédagogue" apprend au
nouveau baptisé les œuvres de la foi. Le troisième devrait donc s’appeler
" le Maître " (o didascalos). En fait, pour le dernier volet de son
projet, il nous a laissé sept livres groupés sous le nom de
" Stromates ". Ce mot est le plus souvent traduit par "tapisseries".
Ce sont donc des réflexions jetées sans ordre apparent qui forment une
tapisserie patchwork. Nous dirions aujourd'hui pour ce genre de travail:
mélanges. Il n'est pas impossible que saint Clément ait laissé ce titre pour
montrer l'inachèvement de son exercice et même l'impossibilité d'y aller
jusqu'au terme. Car il avait l'ambition de créer pour le disciple un état d'âme
supérieur, caractérisé par la connaissance théorique et pratique parfaite des
choses divines et humaines, grâce à la contemplation de "Nos livres,
les Stromates, sont loin de ressembler à ces jardins soigneusement entretenus.
<> Pourquoi ce désordre apparent? Parce que l'Ecriture veut demeurer
secrète et mystérieuse, afin d'échapper aux mains rapaces qui dérobent et
emportent les plus beaux fruits". Strom. 7,
chap. 18 Aucun livre ne peut enfermer Il faut lire les stromates si nous voulons comprendre l'âme de saint
Clément et nous plonger dans la grande tradition de l'Eglise d'Alexandrie,
mélange elle aussi de hautes spéculations théologiques et de simplicité de la
foi, d'élans ascétiques et d'équilibre de vie chrétienne, d'attachement aux
Ecritures et de liberté intérieure. Les stromates sont remplies de ces paradoxes, ils contiennent en
abrégé toute la doctrine de Clément. Nous essayerons ici de saisir l'essentiel
pour notre sujet, connaître les apports de notre tradition alexandrine à la
doctrine chrétienne. Nous dégagerons plus particulièrement les grands thèmes qui
sont: 1. la philosophie, la foi 2. les vertus, l'ascèse.
3. la vie chrétienne
dans le mariage 4. la connaissance de
Dieu & l’apophatisme 5. prière la philosophie: Clément a un
grand respect des spéculations sur la théodicée des philosophes, leur recherche
de la vertu et de la connaissance de l'humanité. Il ne veut pas seulement voir
des fables dans la mythologie mais une œuvre de Si donc Clément croit au larcin des philosophes, il ne condamne pas
l'étude de la philosophie qui est pour lui une sorte de propédeutique à la
connaissance de la vérité. "La
philosophie grecque, selon les uns, atteint comme par hasard la vérité, mais
très faiblement; elle est loin de la posséder toute
entière. Selon
les autres , c'est une création du démon.<> Mais selon nous, si la
philosophie grecque n'a pas la
vérité dans toute sa sublimité, si elle est absolument sans force pour
l'accomplissement des préceptes du Seigneur, toujours est-il qu'elle prépare la
voie qui mène à la doctrine vraiment royale, puisqu'elle corrige et forme les
mœurs à un certain point, et qu'elle rend assez fort celui qui croit à
L'histoire des idées a surtout retenu, et c'est devenu un lieu commun
des théologiens médiévaux, la position de la philosophie servante de la
théologie, le rôle de préparation à l'édification du discours apologétique et
théologique. Aujourd'hui nous ambitionnons d'établir un dialogue
inter-religieux, pour que celui-ci
ne soit pas une simple
tribune de discours creux ou une sorte de fédération syncrétiste, les chrétiens
peuvent mettre en avant la pensée de saint Clément sur la philosophie et
l'étendre aux systèmes religieux: la philosophie est le pédagogue des païens,
comme "Dieu est le principe de
toutes choses bonnes, le unes immédiatement comme l'ancien et le nouveau
Testament, des autres comme secondairement comme la philosophie. Peut-être même,
la philosophie a-t-elle été donnée aux grecs au même titre de l'Ecriture, avant
que le Seigneur les appelât. <> la philosophie est donc une étude
préparatoire, c'est elle qui ouvre la route à celui que Jésus-Christ mène à la
perfection. <> Sans doute Mais attention, Clément ne met pas tout sur le même pied, s'il admet
que les non chrétiens qui cherchent "Tous ceux qui
ont recherché Si les voies de la sagesse sont diverses pour arriver sur la route
qui conduit à "Sans la foi,
il est impossible de plaire à Dieu". Strom.2,2 Bibliographie: * Clément
d'Alexandrie, les Stromates,
traduction M. de Genoude, Paris 1839 La
foi: Après avoir examiné comment saint
Clément nous invitait à comprendre la sagesse philosophique et à découvrir les
parcelles de vérité du Logos dans la philosophie et dans les religions que nous
appelons païennes, nous poursuivons l'étude des Stromates par la recherche de ce
qu'il dit sur la foi. La foi
chrétienne héritière de la confiance en Dieu du judaïsme est tout à la fois,
évidence de l'existence du créateur et de sa providence, recherche de la
connaissance divine et de sa justice, louange et moteur de l'accomplissement des
commandements. Elle ne repose pas sur des discutables preuves de l'existence de
Dieu mais sur la confiance au Dieu qui se révèle dans l'histoire des hommes et
par les Ecritures. "La foi est un préjugé
volontaire, un pieux assentiment, la substance des choses que nous devons
espérer, et l'évidence de celles que nous ne voyons pas. <> Sans la foi,
il est impossible de plaire à Dieu. <> Le sentiment est le principe de la
foi. N'est-ce pas lui qui suggère les principes à notre raison et à notre
intelligence? Ainsi qui croit aux saintes Ecritures reçoit avec elles Le chrétien
de Clément ne se satisfait pas de la "foi du charbonnier", il n'est pas crédule,
ni paresseux. Si certainement, il possède comme une certitude évidente la
réalité de la providence divine, il sait que la véritable relation ne peut
s'établir que par la connaissance, la recherche constante de la communion.
"la foi est
un bien intérieur qui, sans chercher Dieu par la voie de l'examen, le proclame
et le glorifie comme réellement existant. De là pour le chrétien, engendré par
elle et développé en son sein, nécessité impérieuse de travailler avec le
secours divin, à connaître Dieu dans la mesure et la proportion de ses forces.
<> Croire à Dieu d'une foi inébranlable et non équivoque, est le fondement
de la connaissance. <> Il a été dit: "On donnera à celui qui possède déjà".
Qu'est-ce à dire? A la foi s'ajoutera la connaissance , à la connaissance
l'amour, à l'amour la possession de l'héritage. Les vœux du chrétien sont
comblés quand, suspendu au Seigneur par la foi, la connaissance et l'amour, il
monte conjointement avec lui au séjour où règne Dieu et le Gardien de notre foi
et amour". Str.7,
chap.10. Clément met
bien en avant la foi dans le sens de l'hébreu "émouna"= "confiance
inébranlable", comme préalable à toute vie en Dieu. Mais cette vie en Dieu doit
être entretenue et grandir sans s'arrêter de progresser par la recherche de la
connaissance de Dieu et de sa justice. La foi pour ainsi dire est le
commencement de la relation, les fiançailles, tandis que la connaissance de Dieu
est le cheminement vers l'union parfaite, le mariage mystique. Car le chrétien
ne doit jamais cesser de progresser dans l'approfondissement de la doctrine
divine qui conduit à
l'accomplissement des préceptes. Clément remarque que saint Paul en écrivant "C'est dans l'Evangile que nous est révélée
la justice de Dieu, suivant le degré de votre foi", fait allusion au progrès
dans la foi à l'image des apôtres demandant au Seigneur d'accroître en eux la foi, qui pareille
au grain de sénevé, jette de profondes et salutaires racines dans l'âme et y
prend un si vaste développement que la connaissance des plus sublimes mystères
vient y reposer sous son ombre. Le progrès
spirituel: Il est
évident que le progrès spirituel n'est pas à la mesure des seules forces
humaines et qu'il est conditionné au don gratuit de Dieu, ce que nous appelons
la grâce. La foi est le commencement de notre Salut, la foi sauve en nous
permettant de reprendre la relation avec Dieu là où la chute l'avait laissée,
mais la foi sans les œuvres de la foi, la gratitude, l'obéissance aux préceptes
divins et l'action de grâces, est insuffisante pour recevoir en nous la
plénitude du projet de Dieu, vivre en Dieu en toute conscience.
"Pas de
connaissance indépendamment de la foi, pas de foi indépendamment de la
connaissance.<> La foi est l'oreille de l'âme, c'est à elle que le
Seigneur fait allusion dans les paroles "Que celui qui a dans oreilles pour
entendre, entende" afin qu'ayant eu foi , il comprenne ce que dit le
Seigneur, selon le sens que le Seigneur y attache. <>
C'est la
foi qui sauve, jamais néanmoins sans le concours des bonnes œuvres.
Naturellement prédestinés au bien , nous devons faire l'effort pour l'acquérir.
Cette recherche demande aussi un esprit sain et droit, qui ne se laisse retarder
dans ses poursuites par aucune difficulté. C'est là surtout que nous avons
besoin de la grâce divine, d'une doctrine pleine de sagesse, de dispositions
chastes et vertueuses; là enfin qu'il faut demander au Père de nous attirer à
lui". Strom.5, chap.
1 L'amitié de
Dieu: Le parfait
gnostique de Clément recherche la compagnie de Dieu pour devenir son ami,
chanter la louange avec reconnaissance. Sa recherche théologique est toute
orientée pour entrer en communion de plus en plus ardente avec son Seigneur; sa
connaissance des dogmes sacrés n'est point fureur théologique passionnée de
disputes, elle a pour but premier l'intériorisation des mystère pour la vie et
non comme arme offensive. La
méditation des mystères est un sacrifice pacifique qui, selon le sens ancien de
la tradition juive de Corban, permet le rapprochement de la nature humaine avec
l'ineffable divin. "La foi ne
doit point marcher isolée et oisive, mais conduite par l'esprit d'investigation.
Loin de nous la pensée d'exclure toute recherche: "Cherchez dit le Seigneur, et vous trouverez". Selon Sophocle, "la
vérité que l'on cherche activement, on peut la découvrir, elle échappe si on la
poursuit avec mollesse". <> Mais il faut appliquer à la recherche la
faculté clairvoyante de l'âme, écarter tous les obstacles qui pourraient gêner
la découverte, et repousser loin de soi les querelles, l'envie et la dispute, un
des plus redoutables fléaux de l'humanité. <> Chercher à approfondir la
nature de Dieu, avec désir de se rapprocher de lui, et non dans un vain amour de
la dispute, est un exercice salutaire".
Strom.
5, chap.1 Clément
n'est pas ennemi des dogmes ecclésiastiques, il fait souvent appel à
"Il est des malades opiniâtres qui n'essaient pas
même de prêter l'oreille aux exhortations de la vérité. Ils font plus, ils
s'arment de frivolité et d'impudence, blasphémateurs hardis les voilà qui
s'attribuent la connaissance des dogmes le plus élevés sans avoir rien appris,
sans examen, sans effort préalable. <>Le gnostique (le vrai –NDLR-) est
donc le seul qui, ayant vieilli sur les Ecritures et gardant l'inviolable pureté des
dogmes qui lui viennent des apôtres et de l'Eglise, vive une vie selon
l'Evangile. <> La vie du gnostique ne me semble qu'un enchaînement
d'actions et de paroles conformes aux traditions du Seigneur. <> Il ne
faut jamais, à l'exemple des hérétiques, adultérer la vérité, ni déroger la
règle de l'Eglise pour satisfaire un vain désir de gloire personnelle au
détriment du prochain, auquel nous devons apprendre à chérir et à embrasser la
vérité". Strom.
7, chap. 16 La foi
clémentine n'est certainement pas agitation de la pensée, une réponse à
l'anxiété sur la destinée. Clément
recherche l'étymologie grecque du mot foi Pistis et propose le mot stasis qui
signifie station, repos. Ainsi pour lui, "la foi est avant tout, repos
de l'esprit dans ce qui est". Strom. 3, chap.
22 Le désir de
connaître Dieu n'est pas indiscrète curiosité mais débordement du cœur. Le cœur
du fidèle devient la tente de la rencontre, le temple de Dieu. Et, par la grâce,
ce temple mystique se construit et se maintient par trois piliers, la foi, l'espérance
et l'amour. " Dieu est amour, il se donne à connaître à
tous ceux qui l'aiment, comme aussi Dieu est fidèle, il se communique aux
fidèles par la voie du précepte. Il faut que nous nous confondions en Lui par
les liens de l'amour divin, afin de contempler la sainteté infinie par une
sainteté qui lui ressemble, ouvrant une oreille docile et sincère à
A l'entrée
du troisième millénaire, notre occident chrétien est confronté à des nouvelles
formes de religiosité et même à un retour du paganisme dans ses formes les plus
archaïques comme l'astrologie et la sorcellerie. La fausse gnose théosophe qui
prétend révéler les mystères occultés par les Eglises fait appel à un certain
scientisme spirituel. Saint Clément
d'Alexandrie nous dit que la foi est un don de Dieu et que nous sommes sauvés
par la grâce. La vraie gnose, connaissance des mystères, a pour objet d'aimer
encore plus le Dieu vivant pour accomplir notre vocation de créature
déifiée.
Les vertus,
l'ascèse. La foi donne le salut, c'est à dire la
santé parfaite de la personne unifiée dans son corps, son âme et son esprit, et
cela pour toujours (Il n'est pas impossible que pour les premiers alexandrins
comme pour saint Irénée, que le Salut soit apparenté au concept de Vie
éternelle). La foi pourtant ne peut se contenter d'être confiante dans le
destin, elle ne peut sauver sans le concours des bonnes œuvres qui lui donnent
force et vitalité. La foi est en premier lieu, écoute de Le Logos divin par son
incarnation est le modèle parfait que nous devons suivre, car Jésus est le
Sauveur et Seigneur de tous, "enveloppant tout dans son unité". Strom. 4, chap.
25 "Le premier
degré de la foi, c'est connaître Dieu; puis après la confiance que l'on a placée
dans l'enseignement du Sauveur, il faut répudier toute injustice, et penser que
cela est conforme à la connaissance de Dieu. Envisagé sous cet aspect, l'homme
qui rend à Dieu le culte le plus pur est quelque chose d'honorable ici-bas.
<> Mais la plus parfaite, la plus sainte, la plus éminente, la plus
souveraine, la plus royale, la plus bienfaisante de toutes les natures, c'est
celle du Fils de Dieu <> Lui le Logos du Père n'a pris la dispensation de
toutes choses que pour complaire à Celui qui lui a tout subordonné. Voila
pourquoi tous les hommes sont à lui; les uns parce ce qu'ils le connaissent
déjà; les autres quoiqu'ils ne le connaissent pas encore , les premiers à titre
d'amis, les seconds comme fidèles serviteurs, d'autres simples
serviteurs.<> Il est le Sauveur de tous. Le Sauveur et le Seigneur de tous? Oui le
Sauveur pour tous ceux qui ont cru, parce qu'ils ont voulu le connaître.
Seigneur , pour tous ceux qui ne croient pas, jusqu'au jour où, capables de le
confesser, il recevront de lui un bienfait spécial et approprié à leur
situation. Chaque acte du Seigneur remonte au Tout-Puissant, et le Fils lui-même
est pour ainsi dire, un acte du Père. Le Sauveur ne haïra jamais les hommes, lui
qui entraîné par un amour suréminent pour les hommes, sans dédain pour la
faiblesse de la chair, en a revêtu les infirmités pour venir sauver tous les
hommes sans distinction."
Strom. 7, chap.
2
Au premier
abord, il semble que la conquête des vertus, l'ascèse, soit pour Clément une
douce montée vers la perfection sans furieux combats. En un certain sens c'est
bien cela, Clément est le précurseur de la voie d'enfance, chère à Thérèse de
Lisieux dont le nom a fait le tour de l'univers. Le chrétien est en effet entre les mains
du Christ, il lui suffit d'être attentif à sa Parole et de se laisser doucement
transformer en Lui. Par le baptême, nous déposons le vieil homme, nous nous
dépouillons du vêtement de la méchanceté et revêtons le Christ, nous voila, en
vérité, petits enfants de Dieu.
Cela pourtant implique une vie en accord avec cette dignité. Le chrétien
"gnostique" a déjà choisi entre les deux voies, il a délaissé celle du mal et de
la mort pour celle de la justice et de la vie. La voie de la vie mène à la
perfection par un double chemin, celui des œuvres et celui de la
connaissance. Connaître
le Seigneur , c'est certainement être fidèle aux préceptes et travailler avec la
grâce pour acquérir la charité parfaite, plénitude de la foi, imitatrice de
Dieu. Dieu ne
parachève pas son don de vie sans l'acquiescement de l'homme, la vie éternelle
est le fruit de la synergie (l'union des forces) de Dieu et de l'humanité; bien
certainement Dieu est premier et sans lui, rien! les énergies ne sont pas égales
en puissance: l'un donne gratuitement, l'autre reçoit avec gratitude, les deux
mouvements sont indispensables. "Dieu est appelé amour,
parce qu'il est bon. La charité qui émane de lui ne souffre point que l'on nuise
au prochain, soit en lui faisant tort le premier, soit en lui rendant outrage
pour outrage. Pour tout dire en un mot, imitatrice de Dieu, la charité répand
ses bienfaits sur tous indistinctement. La charité comme le Christ, est donc
plénitude de "Regardez le médecin, il
rend la santé aux malades qui par leur énergie intérieure, concourent avec lui
au rétablissement de leur santé. Dieu agit de même vis à vis de nous. Il accorde
le salut éternel à ceux qui travaillent concurremment avec lui à l'édifice de la
connaissance et des bonnes œuvres. Oui la promesse divine ne se réalise que par
l'action de l'homme, puisque l'accomplissement des obligations imposées par le
précepte est laissé en notre pouvoir. Strom. 7, chap.
7 Il y tout de même un combat à mener,
celui de l'acquisition de la liberté d'esprit, de l'éloignement des excès.
"La paix et
la liberté ne sont assurées que par un combat incessant et ininterrompu contre
les attaques des passions." Strom. 2,
chap.20
La lutte
contre les passions, le courage: Lutter
contre les passions consiste à se connaître soi-même, être attentif en tout
temps, en tous lieux, en toutes choses, à chacun de ses actes et de ses pensées
pour savoir si notre conduite est bien celle de l'ami de Dieu qui doit se tenir
toujours en sa présence. La stabilité dans le maintien dans la présence de Dieu
est déjà un avant goût du Royaume. "Le courage
a plusieurs nuances, telles que, la tolérance, l'élévation de l'âme, la force du
cœur, la libéralité, la magnificence. De là vient que le gnostique ne s'affecte
en rien de la censure du vulgaire et ne se soumet ni aux opinions ni aux
flatteries du dehors. <> Il faut donc apprendre à être fidèle à soi-même
et au prochain et à se conformer aux préceptes divins. On est le serviteur de
Dieu quand on se soumet à L'amour
La plus
haute des vertus est sans conteste la charité, l'amour de Dieu et du prochain.
La charité est le sommet de l'enchaînement des vertus, car toutes se tiennent
mutuellement, toutes sont couronnées, amenées à la perfection par la charité.
Clément nous appelle à distinguer le péché du pécheur, haïr la faute, estimer le
coupable. Pour s'élever jusqu'à l'amour parfait, notre Clément enseigne la voie
de l'apathéia (l'absence d'envie) et donc le rejet d'esprit de puissance sur les
êtres et de possession sur les choses. "Il faut
donc que l'homme parfait s'exerce à la charité, et par elle s'élève jusqu'à
l'amitié de Dieu, en accomplissant ses préceptes par amour pour lui. Quand le
Seigneur nous enjoint d'aimer nos ennemis, il ne nous recommande pas d'aimer le
mal, l'impiété, l'adultère, le vol, mais d'aimer le voleur, l'impie, l'adultère,
non en tant qu'ils pèchent et qu'ils couvrent d'ignominie la dignité de l'homme,
mais en tant qu'ils sont hommes et l'œuvre de Dieu. <> Nous disons que les
pécheurs sont ennemis de Dieu! Pourquoi? parce ce qu'ils sont ennemis des
préceptes contre lesquels ils se révoltent. Pour une raison contraire, nous
nommons amis de Dieu ceux qui se soumettent à ses commandements. Amis donc, à
cause des liens volontaires qui unissent ceux-ci à Dieu, ennemis à cause de
l'éloignement volontaire qui les sépare de Dieu. <>
"Tu ne désireras
point". Ce commandement ne flétrit pas la
génération comme si c'était un acte abominable; c'est là une doctrine
impie. Nous disons que les choses
du monde nous sont étrangères, non qu'elles soient déshonnêtes et mauvaises, en
elles-mêmes, non qu'elles n'aient
de commun avec le Dieu, maître de l'univers, mais parce que, hommes d'un jour,
nous ne vivrons pas éternellement au milieu d'elles. Envisagées sous le rapport
de la possession , elles nous sont étrangères, puisqu'elles nous échappent.
<> Il nous faut donc user dans les limites de la nature des choses dont le
précepte nous éloigne sagement, nous tenant en garde contre tout excès et contre
toute affection aux biens matériels. Strom. 4, chap.
13 La vie
chrétienne est pour Clément d'Alexandrie union au Christ par la connaissance de
Dieu et la fidélité aux préceptes de sorte que "suspendu
au Seigneur par la foi, la connaissance et la charité, il monte conjointement
avec lui, au séjour où règne le Dieu et le gardien de notre foi et de notre
charité." strom. 7, chap.
10. L'ascèse
pour notre Clément de présente pas nécessairement des exploits hors du commun et
pénibles, des mortifications héroïques. L'ascèse est naturelle pour un chrétien,
selon son étymologie, c'est le travail de tout les jours; le temps de carême a
pour objet principal de nous amener à Clément
simplifie la question de l'ascèse: pratiquer l'ascèse, c'est être fidèle aux
préceptes du Seigneur Jésus et travailler avec la grâce pour acquérir la charité
parfaite. La
liberté intérieure & le libre arbitre: La
charité parfaite consiste à l'imitation de Dieu. Pour imiter Dieu, il est
nécessaire de conquérir la liberté sur les passions "de dire à Dieu avec une grande liberté:
"Je vis ta vie".
Stromate
7. Cette
affirmation ne doit pas être incantatoire ou illusion, dire à Dieu, "je vis ta
vie", représente un engagement courageux d'être conforme à l'affirmation sous
peine de tomber dans la condamnation des hypocrites. L'âme du fidèle est remplie
de piété, l'obéissance aux préceptes l'a convertie en un sanctuaire où vient
habiter le Logos éternel, l'unique Sauveur de chacun en particulier et de tous
en général. Rien ne doit l'arracher à cette présence, ni les souffrances, ni les
plaisirs. Aussi, celui qui a
conquis l'hésychia, "
Le gnostique s'approche de Stromate
7 Célibat
& mariage: A
partir de cette liberté intérieure, face aux stoïciens et d'autres, Clément pose
l'absolue liberté du choix du mode de vie, mariage ou célibat. Il s'agit de deux
versants d'une montagne menant au même sommet. Chacun présente des grâces et des
écueils, aucun n'est assurance de perfection. "La
continence et le mariage sont laissés à notre choix, sans qu'il y ait nécessité
de commandement de l'un ou de l'autre; Le mariage continue l'œuvre de la
création; qu'on cesse de regarder comme une déchéance, l'union contractée selon
le Logos. <> J'en ai fait la remarque, plusieurs de ceux qui se sont
abstenus du mariage, sous prétexte de ses embarras et de ses soucis, sont tombés
dans une raide misanthropie opposée à la sainte connaissance, et le feu de la
charité s'est éteint dans leurs cœurs. D'autres, aussi , enchaînés au mariage et
menant une vie toute charnelle, au milieu des condescendances de la loi, sont
devenus, selon le langage du prophète, semblables aux animaux".
Stromate
3 Voici
les mises en garde de Clément, elles concernent aussi bien les fidèles mariés
que ceux qui s'engagent dans la continence. La grande épopée monastique, au
temps de Clément, n'a pas encore peuplé l'Eglise. Aussi, il considère les célibataires continents
dans les écoles philosophiques et la qualité des couples chrétiens; Alors il
fait l'éloge des seconds en
montrant que la vertu des premiers se trouve aussi dans le mariage, et parfois
avec une plus grande énergie. Ne faisons pas de contre sens, le discours de
Clément a pas pour objectif de dévaloriser la vie monastique mais de montrer la
valeur du mariage par rapport à un certain célibat égoïste.
"L'homme
parfait supporte tout par amour, il endure tout pour plaire non pas à l'homme
mais à Dieu. <> On est continent, non seulement quand on méprise les
mouvements désordonnés de l'âme, mais quand on a contenu les biens, et que l'on
a conquis sans retour la grandeur de la science d'où jaillissent les opérations
de la vertu. <> [Le gnostique ne sort jamais de sa manière d'être] voilà
pourquoi, il mange, il boit, il épouse, non pas pour lui même, ni comme une fin
fondamentale, mais parce que la nécessité l'y soumet. Epouser, ai-je dit? Oui si le Logos le
lui ordonne, et comme il convient. L'homme parfait a pour exemple les apôtres.
Et en vérité la vertu de l'homme ne se manifeste pas dans le choix de la vie
solitaire. Vous avez surpassé le courage le plus héroïque, si dans le mariage,
dans la procréation des enfants, parmi les soins que réclame une famille, maître
de la joie comme de la douleur, vous restez inséparablement uni à Dieu par
l'amour au milieu de ces mille embarras, et si vous vous armez de toutes les
tentations qui vous viennent de vos enfants, de votre épouse, de vos serviteurs
et de votre fortune. <> Ainsi
l'homme qui ne s'occupe que de lui-même est surpassé par celui qui, inférieur
dans les choses de son salut, mais supérieur dans la dispensation de ce qui
concerne la vie matérielle, reproduit une image atténuée de Ne
croyons pas en lisant cette citation que Clément range l'épouse parmi les
embarras de l'homme et ne reconnaisse pas la dignité de la femme! Il considère
simplement la vie sociale de son temps et l'obligation de l'époux à la bonne
gestion de sa maison. Il n'y a pas de différence de dignité entre l'homme et la
femme, mais certainement distinction. Cela va sans dire, mais va mieux en le
disant en raison de toutes les sottises attribuées à l'Eglise (non sans raison
parfois) sur ce
sujet. "Assurément
il ne paraît pas que la femme, en ce qui touche l'humanité, ait une nature, et
que l'homme en ait une autre. Il y a évidemment dans les deux, communauté de
nature, et par conséquence communauté de vertu. Que si la tempérance, la
justice, et les autres vertus qui en dérivent, sont exclusivement des vertus
masculines, dès lors il appartient à l'homme seul d'être vertueux; voilà la femme
condamnée nécessairement à l'injustice et à l'intempérance. Mais cela est
honteux même à dire. <> Les vertus réclament les efforts communs de la
femme aussi bien que de l'homme <> puisqu'il y a, le fait est avéré qu'une
seule et même vertu pour une seule et même nature. Nous ne voulons pas dire
toutefois que la femme, en tant que femme, ait la même organisation que l'homme.
Le
péché, la mort: Clément,
à l'occasion, tord le cou à l'idée de péché et de mort transmise par la faute
exclusive d'Eve, la première femme du récit de Par
une nécessité naturelle de l'ordre que Dieu a établi, la mort suit la naissance;
et la séparation du corps et de l'âme est amenée par leur
réunion. Mais
si la naissance a lieu pour la discipline et la connaissance, la séparation a
lieu dans un but de guérison- rétablissement. De même que la femme est regardée
comme la cause de la mort, parce qu'elle enfante; ainsi par la même raison, elle
sera nommée le chef de la vie. Stromate
3 La
chasteté: Terminons
sur le sujet de la vie chrétienne par l'enseignement de Clément sur la chasteté
dans le mariage. Précisons: La continence consiste à l'abstention de relations
sexuelles pour des motifs nobles comme se consacrer au Seigneur, tout entier à
un office public, ou d'autres raisons. La chasteté n'est pas la même chose que
la continence, elle recouvre les notions de pudeur, modération, d'unification,
qui n'excluent pas la sexualité. La saine sexualité est non seulement légitime
mais sacrée. "Pour
eux qui ont été sanctifiés, [l'union des corps] est sainte. Chez les chrétiens,
en effet, non seulement l'esprit, mais les mœurs, la vie, le corps doivent être
sanctifiés". Stromate
3 Et
Clément de citer la philosophe Théano: On
lui demandait après combien de jour une femme qui avait copulé avec un homme
pouvait assister aux fêtes de Cérès. "Si cet homme est son époux, à l'instant
même; s'il ne l'est pas, jamais!
Stromate
3 La
prière: Pour
répondre parfaitement à son programme de mener le disciple à la contemplation
parfaite, Clément d'Alexandrie s'attache à montrer que la connaissance des
mystères, s'accompagne nécessairement de la rencontre avec le Dieu Vivant dans
la prière. Par et dans la prière il s'agit d'honorer
et d'adorer celui que nous reconnaissons comme Logos, avec son Père et l'Esprit
Saint. L'adoration consiste à rendre grâces à Dieu pour la vie et la
connaissance de "La
prière est un entretien avec le Seigneur. Nous avons beau nous exprimer à voix
basse, ou méditer en nous mêmes sans remuer les lèvres, nous avons crié du fond
du cœur. Dieu entend cette parole intérieure qui arrive toujours jusqu'à lui.
<> mais la voix, me
dira-t-on, se perd dans les couches inférieures de l'air, sans monter jusqu'à
Dieu. Les pensées des saints, répondrai-je, traversent non seulement l'air mais
le monde tout entier. La puissance divine ressemble à la lumière: <> Dieu
est tout ouïe, il est tout œil, si je puis me servir de ces expressions".
-Stromate
7- La
sainteté vis à vis de Dieu, la justice à l'égard des hommes, sont des dons de la
grâce obtenus par la bonne conscience, fruit de l'instruction divine.
Aussi
la prière est le début de l'union à Dieu. Elle requiert l'orthodoxie de la foi,
car l'union se fait essentiellement dans la communion. "
L'âme, tout entière à la méditation
de Dieu, ne reconnaît plus d'autre mal que l'ignorance et les actes qui n'ont
pas la saine raison pour mobile; elle rend grâce à Dieu, toujours et en toutes
choses, soit en écoutant les paroles de justice, soit en lisant les divins
préceptes, soit en recherchant la vérité, soit en offrant la sainte Oblation,
soit en vaquant à la prière. Elle se répand en louanges, en hymnes, en
bénédictions, en chants d'allégresse. Une âme dans ces dispositions n'est jamais
séparée, même un moment, de son Dieu". Stromate
6 "
Une opinion mal sonnante au sujet de Dieu, loin de conserver aux chants, aux
discours, aux Ecritures et aux dogmes leur caractère de sainteté, descend à des
notions vulgaires et des pensées inconvenantes. De là vient que la bénédiction
du grand nombre ne diffère en rien du blasphème, parce qu'ils ignorent la
vérité" stromate
7 L'action
de grâce: La
forme de la prière n'est point bavardage ou exaltation individualiste, c'est
l'action de grâces, sur le modèle liturgique, pour le passé, le présent, et
"l'avenir
qui est déjà présent par la foi." stromate
7. La
prière personnelle, donc, s'accorde avec la prière "ensemble". Celui qui prie,
dit un père du désert, est uni à tous. Si la prière liturgique est l'aliment qui
nourrit le corps, l'âme, l'esprit du fidèle, sa prière personnelle est comme
l'air qui maintient la vie. C'est d'abord en communauté, que nous honorons le
Dieu qui est communauté indivisible
de trois personnes. "Les
chrétiens font donc sagement d'honorer [Dieu] par des prières et d'envoyer vers
son trône, la sainte et suréminente oblation de la justice;<> Les
chrétiens ont donc un autel terrestre; c'est l'Assemblée de tous ceux qui
s'appliquent à la prière, en ne formant pour ainsi dire qu'une voix et qu'un
esprit". Stromate
7. L'ami
de Dieu a une foi agissante, la foi qui glorifie l'Evangile par les œuvres et la
contemplation. Foi active devant
les hommes et les anges.
"Qu'il
mange, qu'il boive, qu'il choisisse une épouse quand le Logos lui conseille:
pensées, actions, rien que de saint en lui. Il est par conséquent toujours pur
pour la prière. Il prie avec les anges, lui, ange de la terre, jamais un moment
hors de la sainte milice. Il a beau prier seul, il a le chœur des puissances
célestes pour assistant". Stromate
7 Clément
connaît les heures de l'Office divin et précède les pères du désert en disant
que ces Offices de l'Eglise sont le rythme d'une prière permanente.
"Quelques-uns
assignent à la prière certaines heures particulières, par exemple la troisième
heure (tierce), la sixième (sexte), la neuvième (none). Le gnostique lui consume
sa vie dans la prière, désireux de vivre par elle dans l'intimité de Dieu". Pour
nous, la vie tout entière est un long jour de fête. Nous voyons Dieu partout,
<> Quelque soit notre occupation, nous savons toujours la concilier avec
la gloire de Dieu". Stromate
7 Dans
la sainte Oblation de l'Eucharistie nous trouvons toute joie et toute
paix. "L'Eucharistie,
pain et vin sanctifiés n'est pas autre chose que notre Seigneur. C'est bien
véritablement notre Sauveur qui nous initie aux Saints Mystères: Il voit qui le
voit, lui même nous donne ses fêtes". Stromate
4
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